Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

PrÉSentation

  • : le blog lepapouilleur par : Michel
  • : informations sur les différents massages et soins esthétiques: legislation, méthodes, enseignement
  • Contact

Recherche

3 mai 2016 2 03 /05 /mai /2016 12:49

Depuis plus de deux ans, je traîne sur les forums d’esthétique de Facebook. A la fois en tant que vieux professionnel que je suis et en tant qu’ancien professeur, je suis très souvent sidéré par ce que j’y lis.

Notre profession, comme beaucoup de métiers de l’artisanat, demande une grande part de créativité, d’invention, d’innovation. Mais elle demande aussi un respect rigoureux de certaines règles liées à l’hygiène de base, à l’anatomie de l’être humain, aux pathologies parfois rencontrées.

On doit donc sans cesse se renouveler, être à la pointe de la mode, offrir la beauté et le bien être à la clientèle mais on doit aussi ne jamais oublier qu’on travaille sur la peau, la circulation et les muscles de la personne et qu’il y a des règles à respecter. Un maçon qui construirait la plus belle maison qui soit sur du sable mouvant verrait très vite l’édifice disparaitre. Une esthéticienne qui fait des ongles sans respect de l’hygiène élémentaire voit tout aussi rapidement son œuvre bouffée par une mycose ou une bactérie et quand elle fait du celluM6 sur une peau relâchée elle ne peut s’attendre qu’à une catastrophe.

On n’apprend pas aux élèves la physiologie, l’anatomie, la pathologie et le respect de l’hygiène juste pour les embêter mais dans notre profession c’est souvent la base de la réussite de notre travail. On voit très souvent des épilations faites « à l’arrache », sans désinfection de la peau avant et après l’épilation ce qui a très souvent pour conséquence la formation de poils sous peau, de boutons, de réactions cutanées excessives. Et quand je lis des publications qui disent « quand j’épile des hommes, ils ont presque toujours des boutons » et que la réponse donnée est : « c’est normal parce qu’il est certain que les hommes sont moins propres que les femmes ! » ça me fait bondir. J’épile des hommes depuis presque un demi-siècle et les boutons ne sont heureusement qu’accidentels et non une généralité et mes clients ne sont pas plus sales que mes clientes ! Mais quand j’épile, je suis le protocole enseigné et évite de faire n’importe quoi comme je le vois trop souvent. Un nouveau client me disait dernièrement : « à quoi ça sert tout ce tralala ? Moi, où j’allais, elle me mettait la cire et arrachait mes poils. Elle ne m’a jamais fait autre chose ». Donc la personne n’était pas désinfectée, pas talquée, aucun produit post épilation… Quand il est revenu le mois suivant il m’a dit « c’est la première fois que je n’ai pas de boutons après l’épilation ». Il a compris à quoi servait tout ce « tralala » …. Et je ne parle pas de celles « qui désinfectent au talc ! »

On peut changer les cires, leur texture, leur parfum, les produits post-épilation….mais, tout de même, avant le « rituel » il faut penser aux fondamentaux.

Il en est de même pour le massage. Les cours d’anatomie ne sont pas donnés pour occuper le temps et justifier les années d’étude ! Il faut savoir sur quoi on travaille, à quel niveau de profondeur se situent la circulation lymphatique, la circulation veineuse, l’aponévrose, le muscle… La circulation lymphatique et la circulation veineuse ne sont ni au même niveau ni dans les mêmes directions donc dire qu’on fait en même temps les deux (comme par exemple quand on utilise un appareil de pressothérapie), est un contresens anatomique et physiologique. Les deux n’ont pas la même fonction physiologique et même s’il est évident que travailler sur l’une a une action indirecte sur l’autre, ce n’est pas du tout la même chose.

Je me suis amusé, avec l’aide des participantes au forum, à compter le nombre de massages différents proposés dans les instituts : on dépassait la cinquantaine ! Souvent, ces « rituels » sont enseignés sur un week-end et ne se différencient des autres que par l’huile utilisée, le parfum d’ambiance dans la pièce et la musique d’accompagnement. Quoi qu’on fasse, on a un corps sous les mains, un but à atteindre et deux mains pour le faire. En partant de ces bases, on peut broder, gesticuler, masser sur table ou au sol, se mettre un paréo ou un tutu…. Mais si on ne connait pas l’anatomie, la physiologie, la mécanique du mouvement, les chaînes musculaires et aponévrotiques, on restera malheureusement trop souvent dans la médiocrité. N’importe qui est capable de masser dans la mesure où on aime toucher les gens et, de plus, les clients et clientes qui viennent aiment tous être touchés. Mais si on en reste là, pourquoi aller chez un soit disant professionnel ? Bon, disons qu’avec le temps, l’habitude, tout le monde s’améliore mais il est quand même préférable de savoir ce qu’on fait, pourquoi on le fait, sur quel organe on travaille et les résultats qu’on peut espérer obtenir.

Il y a tout un vocabulaire qui cache souvent l’incapacité de la personne qui masse à expliquer ce qu’elle fait : quand on ne sait plus quoi dire on parle de fluides, d’énergie, de magnétisme…. C’était encore recevable il y a un demi-siècle mais maintenant on en sait assez pour donner des explications sérieuses et ne pas en rester au niveau de Diafoirus dans le « malade imaginaire » de Molière !

Des amis enseignants m’ont expliqué qu’ils ne pouvaient pas sortir de ces approximations parce que les études d’esthétique ne permettaient pas de comprendre tout ça. C’est un peu le serpent qui se mord la queue. Ou on admet que les études ne sont pas assez poussées en anatomie, physiologie….et on en reste aux massages de base, soit on essaye de progresser en approfondissant et en élevant le niveau des formations ! Il est évident qu’enseigner le drainage lymphatique à un kiné qui a fait quatre ans d’études après le bac n’est pas la même chose que d’enseigner le drainage lymphatique esthétique à une esthéticienne….surtout quand il faut que ce soit fait en 16 heures comme on me l’a demandé alors que je le faisais en 40 heures aux kinés. Mais qu’on précise bien alors à l’esthéticienne les limites de sa prestation et ce qu’elle peut en attendre !

Les techniques, les connaissances, les soins ont beaucoup évolués en trente ans, on a l’impression que l’enseignement n’a pas suivi. Il serait temps de relever les manches et de s’y mettre ! Un ou une élève qui sort d’une école devrait avoir des bases solides qui lui permettraient de laisser libre court à sa créativité sans risquer de se décrédibiliser aux yeux de la clientèle en faisant des erreurs grossières et débitant au mieux des platitudes, au pire des idioties. La clientèle qui, grâce à internet, peut avoir accès à des informations nombreuses et de plus en plus souvent fournies par de vrai(e)s professionnel(le)s voit très vite à qui elle a à faire.

Le « rituel » est une excellente chose pour un institut et lui permettre de se démarquer des autres, il permet à l’esthéticien(ne) de laisser libre cours à sa créativité et de mieux laisser s’exprimer sa personnalité mais il ne doit pas être un moyen pour cacher des failles professionnelles souvent dramatiques et une méconnaissance ou un oubli des bases de la profession.

Partager cet article
Repost0
3 décembre 2015 4 03 /12 /décembre /2015 17:23
Au revoir Michèle...

Lorsque je suis arrivé à Marseille, j’ai eu la grande chance de rencontrer une personne pour moi exceptionnelle : enfin elle était la bonne personne au bon endroit au bon moment. C’est Madame Michèle Lopez-Capel.

J’étais Marseillais depuis à peine deux semaines quand elle m’a appelé pour que je m’occupe du fils d’une amie à elle. Elle m’avait été adressée par un confrère et ami qui ne pratiquait pas les soins de kinésithérapie à domicile.

Et quand elle est venue m’apporter l’ordonnance au cabinet elle a été surprise de voir sur ma plaque : « Masseur kinésithérapeute D.E. et Esthéticien cosméticien diplômé ».

Elle m’a demandé ce qu’était un kinési esthéticien et je lui ai expliqué que j’avais en réalité les deux diplômes donc les deux casquettes.

Elle s’est alors présentée : elle était directrice de l’Ecole d’Esthétique Jeanne Michaud et, après une petite heure de discussion elle me proposait de venir donner des cours dans son école.

Aussitôt dit, aussitôt fait et j’ai donc, grâce à elle, enseigné une vingtaine d’années l’anatomie, la biologie, l’éducation familiale et sociale aux élèves et assuré les formations en soin du corps, massage relaxant et drainage lymphatique manuel esthétique.

Cette rencontre a aussi été riche en échanges avec une personne cultivée, sensible et extrêmement respectueuse de l’interlocuteur.

C’est grâce à ce poste que j’ai pu rencontrer des personnes que je n’aurais certainement jamais côtoyées en restant dans mon cabinet-institut.

J’ai ainsi pu devenir le masseur puis l’ami de Lydia, une vieille danseuse qui avait dansé devant le roi Farouk d’Egypte, Batista à Cuba… et tout un tas d’autres personnes dans le monde entier. Elle était la fille de Saravia dont le sommet de la gloire avait été de danser, puis qu’elle aussi était danseuse, devant le Tsar Nicolas II. Elle avait aussi été la maitresse d’Henri Barbusse ….mais ça c’est une autre histoire !

C’est Lydia qui m’a présenté son grand ami Maurice Béjart que j’ai eu l’honneur de rencontrer à plusieurs reprises. C’était un homme exceptionnel, impressionnant, profond et chaleureux.

Par l’intermédiaire de Michèle, j’ai pu participer à différents stages et formations dont un inoubliable avec Serges Alvarez en Grèce. C’était un maquilleur hors pair qui avait un amour des produits et des instruments qu’il utilisait : c’était un vrai pro, un artiste.

C’est aussi elle qui m’a fait rencontrer Humbert Pierrantoni, fondateur du journal « les Nouvelles Esthétiques », journal dans lequel j’ai publié plusieurs fois. Ce monsieur était débordant de gentillesse et, quand on se retrouvait avec lui dans ses locaux, il ouvrait un tiroir de son bureau et nous proposait du chocolat ! Comme j’étais aussi gourmand que lui, on s’entendait bien. Il a eu aussi la gentillesse de me convier au Congrès annuel de son journal.

Nous avons écrit avec Michèle un livre sur la cellulite qui m’a ouvert aussi les portes de plusieurs congrès professionnels, autant médicaux qu’esthétiques et qui m’a aussi permis de participer en tant qu’expert à des émissions de télé. Je me souviens entre autres de E=M6, émission pendant laquelle j’avais pu dire tout le mal que je pensais d’un appareil « miracle » qui devait résoudre (comme les dizaines qui ont suivis) le problème de la cellulite et faire maigrir sans chirurgie ni régime. Pendant un mois j’ai été harcelé au téléphone par les représentants, acheteurs….qui me menaçaient rien que moins de faire disparaitre mon institut et me couler de telle façon que je n’oserai même plus essayer de me relancer ! Il y a bien 20 ans de ça, je suis toujours là, eux ils n’y sont plus.

C’est grâce à Michèle que j’ai aussi connu des centaines d’élèves. Certaine géniales, d’autres gentilles, d’autres que j’ai préféré vite oublier. Mais je pense qu’il en est de même pour tous les profs.

L’école Michaud a fermé en juin dernier. Elle avait tenu plus d’un demi-siècle, c’était une institution. Pendant que j’y ai travaillé, nous n’avons jamais eu moins de 90% de réussite au CAP. Il faut dire que Michèle était très stricte et qu’on ne lâchait pas tant qu’une fille n’y arrivait pas. Ce qui m’avait aussi surpris lorsque j’y suis rentré c’est la rigueur au niveau de la politesse : on se serait cru dans une institution religieuse, tout juste si les élèves ne faisaient pas la génuflexion en nous saluant. Je me suis vite rendu compte que c’était nécessaire pour donner les bases d’éducations à certaines et surtout pour assurer à toutes un avenir professionnel : la vulgarité est encore plus choquante quand on travaille dans le monde de l’esthétique.

Michèle nous a quittés il y a quelques jours. Elle avait tenu, malgré la maladie qui l’a emportée, l’école jusqu’au bout. Sa rigueur qu’elle s’imposait, qu’elle imposait aux élèves, elle l’imposait aussi aux profs ce qui était parfois à la limite du pénible à supporter mais on ne pouvait lui en vouloir, la réussite était à ce prix. Son départ me peine beaucoup non seulement parce qu’elle marque la fin d’une coopération professionnelle mais aussi parce que c’est la fin d’une amitié mâtinée de tendresse.

Je tiens à remercier Michèle pour tout ce qu’elle a apporté au monde de l’esthétique en étant plus de trente-cinq ans à la tête de l’école Jeanne Michaud mais aussi pour tout ce qu’elle m’a apporté personnellement : sans notre rencontre, ces vingt-sept dernières années n’auraient pas été pour moi aussi riches en rencontres, en instants de bonheur et surtout ma vie professionnelle n’aurait pas été aussi pleine et intéressante.

PS: sur la photo: Lydia, Maurice et ma plus jeune fille lors d'une soirée.

https://www.youtube.com/watch?v=dNwP2lJKDh8

Partager cet article
Repost0
11 avril 2014 5 11 /04 /avril /2014 17:11
Forum esthétique

Je participe depuis plusieurs semaines à un forum ouvert aux esthéticiennes. Jusqu’à présent je n’y ai croisé que des personnes sympathiques qui n’éprouvent pas, comme c’est souvent le cas sur internet, le besoin d’agresser ou d’insulter les personnes qui ne partagent pas leur avis. Cette façon de communiquer facilite les échanges constructifs.

En revanche, ce qui me navre, c’est de voir à quel point certaines consœurs ne sont pas préparées à pratiquer ce métier.

Elles ont reçu l’enseignement de la pratique des soins esthétiques, parfois visiblement pas ou mal assimilé le contenu théorique mais à l’évidence les études ne semblent pas donner assez d’importance d’une part à la gestion et à d’autre part au manque d’esprit critique.

Pour ce qui est de la gestion, on voit vite que de nombreuses prestations sont tarifées au pifomètre ! Les consœurs prennent tant, je vais prendre un peu moins pour être plus compétitive… Ce raisonnement frôle l’absurde quand les consœurs ont eu le même raisonnement avant nous vis-à-vis des autres instituts et qu’on en arrive ainsi à bosser presque à perte ! Alors que reste-t-il comme solutions pour rester compétitif? Certaines ne respectent plus les règles élémentaires d’hygiène et de sécurité, comme on le voit de plus en plus souvent avec les lampes UV qui ne sont pas changées aussi souvent que nécessaire et l’hygiène générale qui se gère à l’économie. D’autres bâclent la prestation, ce qui aura pour effet de faire fuir la clientèle. D’autres encore achètent des produits moins chers, ce qui reste possible dans certaines gammes (draps d’examen, cotons…) mais devient plus problématique quand il s’agit de cires à épiler, des prothèses ongulaires et produits cabines.

Pour ce qui est de l’absence d’esprit critique, je le remarque sur l’achat de certains appareils coûteux. Un manque de culture et d’historique de la profession pousse certaines consœurs à s’endetter au-delà du raisonnable pour des appareils qui, on le sait depuis des lustres, ne donnent pas, dans le temps, les résultats escomptés.

Je suis dans le métier depuis plus de quarante-cinq ans. J’ai vu régulièrement revenir des appareils qui, des années plus tôt, devaient révolutionner la profession, se sont vendus pendant deux ou trois ans jusqu’à ce que la jeune génération de professionnelles se rende compte que les résultats attendus n’étaient pas au rendez-vous. Ces appareils sont alors tombés dans l’oubli une dizaine d’années avant de revenir ensuite sur le devant de la scène pour piéger les jeunes qui sortent de l’école. On voit par exemple ressurgir du passé des appareils à ultra-sons supposés révolutionner les cures d’amincissement et soins anti-cellulitiques. Ils ne donnaient pas de résultats durables il y a trente ans, ils ne faisaient pas mieux il y a vingt ans et en sont toujours au même point d’inefficacité aujourd’hui. Malheureusement, les générations qui se sont fait avoir il y a trente ans ne sont souvent plus là pour mettre en garde les jeunes diplômées qui arrivent sur le marché, ce qui permet de les piéger à leur tour. Les professionnelles ne se demandent pas non plus pourquoi l’appareil miracle supposé les démarquer de la concurrence n’est plus utilisé par d’autres professions qui y ont eu accès bien avant elles et ont fini par laisser tomber faute de résultat et/ou de rentabilité. Enfin, le manque d’esprit critique ou de logique élémentaire se fait également ressentir aussi lorsqu’elles pensent avoir un résultat durable et spectaculaire sur tel ou tel problème esthétique avec un appareil à trois mille euros, alors que les dermatologues (pour ne citer qu’eux !) n’ont pas toujours les résultats escomptés avec des appareils souvent vingt fois plus onéreux ! A priori, les médecins n’étant pas tous débiles, c’est bien que le problème doit être ailleurs !

Il faut bien convenir que le monde de l’esthétique est avant tout un marché. Un marché porteur pour les fabricants de matériel et vendeurs de fournitures. Un marché porteur également pour les revues spécialisées. Un marché porteur aussi pour les écoles et toutes les personnes chargées de la formation continue. Les esthéticien(ne)s ne sont que le maillon qui permettra à tous ces gens de vivre. Les revues, financées par les fournisseurs, ne donneront jamais une information pouvant nuire aux intérêts des personnes qui financent leurs revues par la publicité. Les écoles ne peuvent pas non plus rester tout le temps très objectives, puisque pour une partie d’entre elles, elles bénéficient de tarifs très réduits sur les produits des marques utilisés pour la pratique. Quant aux formations, si elles n’étaient pas soutenues financièrement par les grandes (ou petites) marques, elles seraient difficiles à organiser, trop couteuses et donc lourdes à supporter par les professionnel(le)s. C’est un peu le système « je te tiens, tu me tiens par la barbichette » !

Afin de permettre une plus grande vigilance, les professionnels de l’esthétique auraient grandement besoin d’une revue totalement indépendante, comme il en existe par exemple pour les médecins avec la revue « Prescrire ». Cependant, afin de pouvoir exister une telle revue nécessiterait un financement par un système d’abonnements. Hélas, un tel système de financement autonome et indépendant n’est pas envisageable tant que les esthéticien(ne)s manqueront d’esprit critique, seront globalement satisfait€s du système actuel et que l’esprit de la profession ne changera pas. Pour espérer une telle révolution dans la profession, il faudrait une véritable prise de conscience des enjeux qui est encore loin d’exister dans le milieu de l’esthétique.

La route me semble encore longue avant que la profession soit devenue adulte et puisse fonctionner sans ces tuteurs parasites que nous proposent aussi bien les marques que les fabricants, les écoles ou encore les centres de formation… Mais je suis un optimiste né et je ne désespère pas de voir émerger, un jour, une esthétique « adulte » et indépendante. Une esthétique responsable dans laquelle les esthéticien(ne)s proposeront un soin parce qu’il a une efficacité scientifiquement prouvée par des laboratoires indépendants des marques, et non plus un traitement « parce qu’il marche », « parce que c’est le meilleur », « parce qu’actuellement c’est le dernier sorti sur le marché » ou « parce que j’ai lu dans ma revue préférée que c’était un must » ou « je vous propose ce soin parce que vous le valez bien »… !

Partager cet article
Repost0
9 janvier 2014 4 09 /01 /janvier /2014 14:31
Petite histoire à peine imaginaire !
  • Bonjour monsieur, Vous avez rendez-vous ?
  • Oui, à dix heures.
  • Vous avez pensé à l’ordonnance ?
  • Oui et aussi à la carte vitale et à la mutuelle.

Et une fois les papiers remplis la charmante jeune dame me conduit dans une cabine.

  • Vous vous déshabillez et vous vous allongez sur le ventre.

Cinq minutes après, elle revient me mettre sous infra-rouges. Dix bonnes minutes se passent et elle entre avec une espèce de cataplasme. Je reste un quart d’heure ainsi, le temps que le cataplasme ne refroidisse et la charmante dame vient me brancher des électrodes de chaque côté de la colonne vertébrale. Après dix minutes que je trouve très longues puisque j’ai de plus en plus mal aux reins vu que la position en procubitus ne me va absolument pas elle vient me débrancher et me fixe un rendez-vous pour le surlendemain à la même heure.

C’est tout ?

  • Vous pensiez quoi ?
  • Ben que j’aurais un massage vu que c’est pour ça que le médecin m’adresse à vous.
  • On ne masse pas en phase hyperalgique et, en plus, le kiné n’est pas là en ce moment, il fait ses soins à domicile.

J’apprends donc, en une phrase que je suis en phase hyperalgique (alors que le médecin m’a bien dit de ne commencer les soins que quand les médicaments auraient fait effet et que j’aurai moins mal ce que j’ai fait) et que j’ai été « soigné » par la secrétaire !

J’ai eu droit à un massage de dix minutes maxi à la cinquième séance. Juste le temps de permettre au kiné de me dire qu’en comptant trois séances pour une faite, il pourrait me soulager bien plus rapidement en me faisant de l’ostéopathie et surtout en l’entendant se plaindre des faibles honoraires perçus en fonction du nombre d’années d’étude nécessaire pour obtenir son diplôme (BAC+4).

Vu que je n’étais pas en position pour être désagréable, je me suis retenu de lui dire que les quatre premières séances avaient été faites par sa secrétaire qui, elle, n’avait pas fait quatre ans d’études après le bac, ensuite qu’il était en train de me proposer de me faire une séance pour le prix de trois ce qui triplait quand même ses honoraires.

La kinésithérapie est en situation difficile. Les tarifs sont, comme ceux de nombreux médicaux ou paramédicaux, ridiculement bas : on trouve par exemple normal de payer trente Euros de déplacement à son plombier, de payer 100 Euros de l’heure son réparateur auto mais si le kiné vient chez vous il reçoit généreusement quatre Euros et, s’il respecte la nomenclature, il est à moins de quarante Euros de l’heure. Mais je me demande si c’est en agissant comme de nombreux kinés le font qu’on va améliorer la situation. Pourquoi la sécu augmenterait-elle des honoraires de soins qui peuvent être faits par une secrétaire ? Pourquoi la sécu augmenterait-elle des honoraires de soins alors qu’elle voit très bien qu’avec les tarifs actuels les kinés ne s’en sortent pas si mal que ça (les organismes n’ont pas d’intérêt à aller regarder ce qui se passe dans les cabinets vu qu’ils y trouvent, eux aussi, leur intérêt). Comme dans beaucoup de métiers (restauration, artisanat…) les professionnels ont été « poussés à la faute ou à la fraude » et un nouvel équilibre s’est installé : a-t-on vraiment intérêt à ce que ça change ? En tout cas, je ne crois pas que pour les kinés le changement soit pour demain, ni pour après-demain parce que ce changement imposerait une telle évolution à la fois dans les mentalités et les façons de travailler qu’à mon avis beaucoup de professionnels n’y sont pas prêts.

Partager cet article
Repost0
17 décembre 2013 2 17 /12 /décembre /2013 18:20
FIN DE CURE

Enfin, je devrais dire bilan postcure puisque quand j’ai terminé ma cure, il y a maintenant un mois, j’étais complètement explosé.
On m’avait bien averti : la cure peut réveiller des douleurs. Non seulement j’avais, après avoir mijoté trois semaines dans les eaux sulfureuses des Camoins réveillé toutes mes douleurs mais j’avais, en plus, mal là où je n’avais jamais eu mal auparavant. Comme me disait souvent ma vieille patiente et amie Lydia : « je ne suis qu’une douleur ».
Le médecin que j’ai rencontré le dernier jour m’a dit : « on ne fait le bilan d’une cure qu’un mois après sa fin et ce n’est qu’au printemps prochain, après avoir passé un hiver, que vous déciderez si vous recommencez ». Le fait est qu’il y a un mois, j’aurais de suite répondu que cette expérience, aussi enrichissante qu’elle ait pu être serait pour moi la première et la dernière. Et depuis je suis parti en vacances, j’ai marché parfois presque vingt kilomètres dans la journée sans m’en rendre compte et je me dis que cette cure a certainement dû améliorer les choses.
En tout cas, s’il y a des personnes à qui je tire mon chapeau, c’est bien au personnel parce qu’est-ce que ça doit être éprouvant de bosser en station thermale. Il y a des filles qui passent leur journée à étaler de la boue chaude et malodorante pendant six heures d’affilée pour un SMIC. Les masseuses et masseurs sont eux aussi six heures de suite, avec un massage toutes les dix minutes, sous une eau chaude qui arrose le patient pendant qu’ils massent et ce pour juste 2000 euros par mois. C’est vraiment le bagne ! Et ceux qui ne font pas grand-chose comme les surveillants de piscine qui n’ont qu’à vérifier qu’on est bien là et qu’on ne se noie pas (vu qu’en trois semaines je n’ai eu droit qu’à une seule séance de gym aquatique dirigée) doivent s’ennuyer mortellement. La cure ne doit être rentable, financièrement parlant, que pour la direction parce qu’avec environ soixante personnes à l’heure pendant six heures et ce six jours sur sept, ça doit quand même assurer de bons revenus !
Je me dis que j’ai eu beaucoup de chance de ne jamais avoir été obligé de travailler dans ce genre d’établissement et les kinés (tous espagnols sauf deux retraités qui viennent ici pour s’occuper et arrondir leurs fins de mois et une dame que je croyais même pas kiné….mais dont on m’a certifié qu’elle avait eu, un jour, son diplôme) qui sont ici ne doivent pas avoir la vie belle….même si visiblement ils n’ont rien à faire des personnes massées et font de l’abatage.
Je ne suis plus aussi catégorique qu’il y a un mois et il n’est plus exclus que je ne retourne pas l’an prochain me tremper dans ces eaux malodorantes mais bienfaisantes à ce que je peux en juger au résultat. Je me dis que si la sécu rembourse ces soins, c’est qu’elle doit y trouver son compte…et les malades aussi. Reste à voir comment sera mon hiver et, comme me l’avait dit le médecin, c’est au printemps que je prendrai ma décision !

Partager cet article
Repost0
3 novembre 2013 7 03 /11 /novembre /2013 11:36
Ma cure aux Camoins

Ma cure thermale : premières impressions !

Quand j’ai décidé de prendre ma retraite, je me suis dit qu’il devenait urgent que je prenne ma santé en main. Depuis quarante cinq ans je me suis occupé des autres, lumbagos, douleurs, arthrite, arthrose, tendinites ou pas, le matin je savais qu’il fallait y aller et je ne me suis jamais trop écouté. Alors j’ai pensé qu’une bonne cure thermale ne pouvait que me faire du bien. J’en avais conseillé à mes patients avec des arguments trouvés dans les guides du thermalisme et, je dois l’avouer, dans les légendes urbaines : ça semblait pas mal.

D’entrée j’ai eu une première surprise. Quand j’ai fait ma demande, je pensais qu’on allait me demander mes radios, examens, scanners et autres IRM. Et bien non : on m’a demandé la copie de ma feuille d’impôts pour savoir si je pouvais prétendre à un remboursement de mes frais de transports et d’hébergement. Vu que je fais ma cure aux Camoins, quartier de Marseille (ville plus connue pour ses quartiers nord que par comme une station thermale) cette démarche était inutile mais ça doit occuper du personnel à la sécu ! Comme je m’y attendais, je suis trop riche : je loge donc chez moi et je paye mon essence. Cette absence de contrôle médical m’a, dans un premier temps, conforté dans mon idée du manque de sérieux de ce genre de prestation.

J’ai rencontré le médecin des thermes pour une visite pré-cure. Un mec hyper sympa et visiblement très compétant. Il m’a examiné, a regardé mes radios et a établi un programme de cure. A première vue programme alléchant avec massages, bains, applications de boues… On allait enfin s’occuper de moi. Ce qui aurait pu me mettre la puce à l’oreille c’est quand il a évoqué des problèmes éventuels de démangeaisons et d’augmentation des douleurs mais dans mon enthousiasme de jeune curiste, je n’y ai pas apporté une attention particulière. Il m’a aussi expliqué le pourquoi du manque de vérification de la part des organismes sociaux : les médecins qui demanderaient trop de cures seraient vite mis sous surveillance et comme l’amie qui avait établi le dossier n’en demande jamais pour sa patientèle, ils en ont conclu que ce devait être justifié.

Je suis donc arrivé le premier jour muni de mes papiers, d’un chèque (le nerf de la guerre). J’avais aussi la tenue du parfait curiste : maillot de bain et bonnet (assortis : on est chic ou pas !) plus une paire de savates. On m’a remis un programme et je suis entré dans le saint des saints. Première impression : ça pue, c’est chaud, c’est humide et il n’y a que des vieilles !

En effet, les eaux sulfureuses des Camoins puent le soufre ! Et je peux vous assurer que quand vous y avez passé une à deux heures, vous gardez l’odeur sur vous pendant plusieurs jours ! Je n’ai rien trouvé qui couvre cette odeur de vase pourrie : gels douche, déodorants, eaux de Cologne…. Dès que tu bouges, tu transpires et tu pues à nouveau ! Je me demande comment font les personnes qui y travaillent…. Parce qu’en plus, ça débouche les narines !

L’humidité, dans les thermes, c’est difficile à éviter alors on fait avec.

Les vieilles, ce n’est pas qu’une impression de prime abord. Dans la piscine où nous sommes réunis, il y a en moyenne seize femmes pour quatre hommes. Il semblerait que les femmes souffrent plus de rhumatismes que les hommes. Ou peut être que pendant qu’elles sont là, elles rencontrent du monde alors qu’elles se font chier chez elles. Ou alors, les mecs préfèrent l’odeur du Pastis à celui du soufre et les glaçons à une eau qui doit faire dans les quarante degrés à la source.

On est donc tous à traîner dans les couloirs entre deux postes de soins : petit sac des thermes à la main dans lequel on a le planning des dix huit jours que dure la cure, un verre et notre serviette. Tout le monde en peignoir blanc, savates et bonnet et, comme à l’armée, on se déplace l’un derrière l’autre sans un mot parce qu’il faut reconnaitre que pour être calme, c’est calme. Réunir tant de personnes dans un tel silence, il faut le faire, et ils y arrivent. Tout est minuté pour que le centre soit parfaitement rentable. Ils doivent avoir un sacré programme informatique parce qu’on n’attend pour ainsi dire jamais et les soins s’enchainent de façon parfaite. Le personnel est hyper rodé et arrive à garder le sourire alors que le travail ici doit être vraiment pénible. Je m’imagine la vie de la nana qui pose les boues toutes les deux minutes, va de cabine en cabine et les enlève dix minutes après, lave la cabine et recommence, comme ça, des heures durant. Les masseurs ont six personnes à l’heure : il ne faut pas s’endormir sur le sujet…il y a quelqu’un qui attend devant le box !

Les effets semblent assez rapides. Je suis arrivé en pleine forme et dès le troisième jour j’avais mal partout. Le médecin avait raison : la cure peut réveiller des douleurs ! Reste à espérer qu’à la fin de la cure elles auront l’idée de disparaitre. En plus, ça crève. On ressort des soins comme si on avait fait le Marseille-Cassis : fatigué, endolori, courbatu et avec une grosse envie de sieste.

Donc, à mi-parcours, mes idées sur la cure sont en train d’évoluer. Je croyais qu’on y allait pour se détendre et s’amuser alors qu’en vérité c’est d’un ennui mortel et fatigant. Je voyais ça comme un bon moyen de se relaxer cool, c’est un véritable soin qui fait réagir l’organisme de façon assez violente. J’avais goûté à la thalasso, je peux dire au bout de dix jours que la thalasso est à la cure ce que le paradis doit être à l’enfer (la première sent les huiles essentielles, l’autre le soufre, ce ne doit pas être par hasard !). J’ai l’espoir, à mi-cure, qu’il y aura des résultats parce que c’est loin d’être une partie de plaisir et qu’à moins d’être masochiste ou de vraiment s’ennuyer chez soi, je ne vois pas quel être censé pourrait en redemander s’il n’y a pas d’amélioration à la fin !

Si j’en réchappe, que je suis encore en capacité de me servir de mes mains qui sont de plus en plus douloureuses, je viendrais faire un point de postcure. A bientôt….j’espère !

Partager cet article
Repost0
15 octobre 2013 2 15 /10 /octobre /2013 13:09
Quarante-cinq ans après……….

En septembre 1968, j’entrais pour la première fois dans un hôpital pour autre chose qu’une maladie ou une visite : je portais une blouse blanche ! Je dois avouer que je n’étais pas peu fier, je débutais ma vie de kinésithérapeute.

J’ai vite réalisé que derrière la blouse blanche se cachait très peu de savoir. En 1968, la kinési était avant tout empirique. Nos profs étaient d’anciens profs de gym recyclés. On appelait les bases de la rééducation « gymnastique construite élémentaire ». Pour ce qui est de l’enseignement du massage, on se contentait du « massage suédois » et je n’ai que très rarement et succinctement entendu parler pendant mes études de drainage lymphatique, de massage chinois ou autres approches des thérapies manuelles. La plupart des kinés de l’hôpital étaient des « masseurs par équivalence » ce qui voulait dire qu’ils n’avaient aucun diplôme mais une plus ou moins longue pratique du massage. Les professeurs d’éducation physique qui faisaient un stage hospitalier dans un service de kinésithérapie avaient, pendant longtemps, obtenu le diplôme de kinésithérapeute et ils étaient nombreux à l’époque à bosser en rééducation.

On nous enseignait des principes « qui marchaient » et il ne fallait pas trop poser de questions : la kinésithérapie était encore très primaire et héritière des masseurs et des rebouteux avec de petites touches de gymnastique suédoise.

Puis, dans les années 1975/1980 on a de plus en plus parlé de Mézières, d’ostéopathie, de drainages lymphatiques, de massages réflexes. Il faut reconnaitre qu’au début, on était encore dans le vécu plus que dans le scientifique. J’ai été emballé par mon stage chez Mademoiselle Mézières : le cadre était génial, l’ambiance studieuse, les résultats immédiatement visibles….mais les explications qu’elle nous donnait n’avaient vraiment rien de sérieux et le pauvre Philippe Souchard essayait tant bien que mal de donner des explications scientifiques à la méthode ! On restait un mois dans le pays de l’Armagnac, ce qui ne gâchait rien à l’affaire. J’ai aussi beaucoup appris de Mademoiselle Hendrix sur le massage réflexe et du Docteur Borsarello et de son service sur le massage chinois. Au passage, je suis aussi allé voir chez Jarricot ce qu’il donnait en auriculothérapie et j’ai même suivi une formation avec le Docteur Nogier sur le même sujet. Tout bougeait dans le domaine de la kinésithérapie. J’ai aussi beaucoup appris en allant me former en sophrologie avec les docteurs Hubert et Abrezol qui venaient de se séparer de Caicédo. De partout jaillissaient de nouvelles théories, de nouvelles méthodes et comme dirait Laurent Ruquier, j’ai (presque) tout essayé ! En réalité, je ne pensais pas me disperser puisque de chaque formation je ramenais quelque chose.

Puis le reboutement est devenu ostéopathie au début des années 1980. Je suis allé passer mon diplôme, comme beaucoup de kinés. Avec les notions de chaînes ostéopathiques, de lésions primaires et secondaires, cette nouvelle approche nous permettait de mieux comprendre ce qu’on faisait et pourquoi telle ou telle méthode, suivant le sujet et la pathologie, donnait de meilleurs résultats que d’autres. On avait enfin une approche scientifique de la kinésithérapie, des explications logiques aux différentes lésions et aux différentes thérapies. On avait, de plus, un panel de méthodes différentes et complémentaires qui nous permettait de choisir ce qu’on allait faire pour obtenir le meilleur résultat possible. L’ostéopathie, les chaînes musculaires, le drainage lymphatique, le massage suédois, la proprioception ? Autant d’approches possibles pour soulager les patients avec la possibilité d’expliquer notre choix pour telle ou telle approche thérapeutique. Il faut dire aussi que cette période a été l’Âge d’Or pour les kinés : nos tarifs étaient confortables et on vivait tous très bien.

Puis est venue la troisième ère pour moi : les années 1990. Nos tarifs ont été bloqués, un quota d’actes a été établi, il a fallu changer pour beaucoup le fusil d’épaule. A cette époque on a aussi vu arriver de nombreux fabricants de matériels. Ce sont eux qui finançaient la presse professionnelle et la presse dite médicale. Un « bon » kiné se devait d’avoir tel ou tel appareil. On est alors entré dans une phase commerciale de la profession. On ne faisait plus ostéo pour comprendre comment fonctionne l’organisme mais pour faire des actes « hors nomenclature ». On n’apprenait plus le drainage lymphatique mais on mettait aux patients les bottes de pressothérapie (pendant ce temps on pouvait voir d’autres patients) alors que les bottes sont destinées au massage circulatoire veineux et surtout pas à la circulation lymphatique. On branchait les patients en électro, on les mettait sous infra-rouges, sur un vélo, devant un appareil miracle pour débloquer une épaule ou un genou. Les cabinets ont pris des airs de salles de gym : une secrétaire-assistante installe les patients qui, parfois, ne connaissent même pas leur kiné et ne passent jamais entre ses mains. Je vous devine en train de sourire mais pourtant je n’exagère pas : j’ai eu une fois une patiente qui me parlait du cabinet où elle allait avant de venir chez moi. C’était la kiné qui s’occupait d’elle. Le seul problème est que dans ce cabinet il y avait deux kinés hommes….et une secrétaire. Elle m’a décrit sa kiné, c’était bien la secrétaire ! On a aussi les cabinets « Club Med » avec musique, boissons rafraichissantes, appareils…et des kinés GO qui blaguent d’un patient à l’autre. Une de mes patientes travaillait dans un centre de ce type…et venait se faire masser chez moi.

Aujourd’hui, on en arrive à avoir au téléphone des personnes qui demandent « Est-ce que vous faites des massages ? ». « Mais oui, madame, je suis kinésithérapeute ! »… « Je sais mais je cherche un kinésithérapeute qui fasse des massages parce que j’en trouve pas ! ». Je prends donc ma retraite en laissant un métier que je ne connais plus. Je n’ai jamais pu m’adapter à ce côté commercial de la profession et à cette course au fric. Je me suis cramponné et ai pu tenir jusqu’au bout en faisant le métier que j’ai choisi il y a plus de quarante ans et que j’ai toujours aimé. Toutefois je ne critique pas pour autant les adeptes du « tout commercial » : les tarifs actuels des actes ne permettent pas de continuer à bosser comme je le faisais. Un jeune professionnel qui doit investir pour payer son appartement, son cabinet, élever ses gosses et mener une vie normale ne peut plus s’en tirer sans entrer dans le système. J’ai pu le faire parce que lorsque la situation s’est dégradée j’avais déjà pu me constituer un confortable coussinet et que je n’avais plus d’enfants à charge. Je dois dire que j’ai eu de la chance d’être kiné à la bonne époque d’autant plus que je ne suis pas capable de faire plusieurs choses à la fois et de suivre sérieusement quatre ou cinq personnes en même temps. J’ai besoin de créer un contact avec les patients, ce qui est impossible si on doit en recevoir une quarantaine par jours comme c’est souvent le cas. J’ai besoin de temps pour comprendre, aider, soigner, apporter quelque chose, échanger : je suis en trop grand décalage avec les pratiques de l’époque actuelle…. il est donc temps que je prenne ma retraite !

Partager cet article
Repost0
3 mars 2013 7 03 /03 /mars /2013 14:57

 

Pendant des années, une lutte sans merci a opposé les kinésithérapeutes et les masseurs « bien-être » au sujet de l’utilisation du vocable « massage » et « masseur ». Il y a eu un certain nombre de procès, des plaques dévissées, des publicités changées ; Les esthéticien(ne)s ont choisi de parler de « modelage » pour éviter tout problème. Enfin, après des années de palabres, de discussions, de négociations, les « masseurs bien-être » ont pu s’appeler « masseurs » à condition de bien préciser que leurs soins n’étaient en rien médicaux et/ou thérapeutiques.

Le problème était donc, enfin, résolu.

 

Enfin, c’est ce qu’on a cru parce que des formations en massage bien-être il y en a des tonnes….et aucune n’est officiellement reconnue ! Et qu’en plus une grande partie de ces masseurs n’a de formation que littéraire ou par vidéo et n’a jamais suivi de formation. C’est cette faille, l’absence de diplôme, qui a permis à la prostitution de s’engouffrer dans la brèche et on voit maintenant fleurir à chaque coin de rue des centres de massages dans lesquels sont proposés des soins divers et variés parfois assez éloignés du massage traditionnel…et les masseurs commencent à se plaindre !


DSC03005.JPG

 

Un ami me demandait dernièrement « comment tu fais avec les clients qui te demandent « une finition » ou un « massage prostatique » ? ». Parce qu’il y a les clients qui demandent quand ils appellent ce qu’ils peuvent espérer recevoir comme prestations  lors de la séance et les choses sont claires. Et il y a ceux pour qui il est devenu tellement évident que « massage bien-être » est synonyme de prostitution qu’ils ne posent même pas la question!  Et quand, à la fin du soin ils nous demandent « et le massage de la prostate, c’est en supplément ? », ou bien « vous n’allez quand même pas me laisser repartir comme ça ! »…c’en devient  gênant pour le masseur ou la masseuse. Personnellement, vu mon âge, les choses sont claires et, encore la semaine dernière, un monsieur s’est présenté chez moi et quand il m’a vu s’est contenté de me dire « désolé, je crois que ça va pas le faire » ! En effet, ça ne pouvait pas  « le faire »,  il s’était trompé d’adresse !

 

dscn1831.jpg

Je ne suis pas moraliste du tout et je pense que, s’il y a accord entre deux personnes, ce qui peut se passer dans une salle de massage ne me regarde en aucune façon. Le principal est, qu’après une prestation, les deux protagonistes soient satisfaits ! Et je comprends aussi parfaitement la déception de la personne qui pense payer pour une prestation qui ne lui est pas assurée et qui, espérant une petite gâterie n’aura qu’un massage classique. Mais le problème existe. Il ne faudrait pas que, alors qu’elle essaie de se construire une image de sérieux et de professionnalisme, la profession de « masseur bien-être » soit discréditée par ces centres qui utilisent leur image. Les deux fonctions répondent à une demande, il faut donc les satisfaire, mais il serait temps de mieux structurer la profession de « masseur bien-être » afin protéger son image et sa crédibilité. On va bientôt être obligé, après le mot massage, pour ne pas se mettre les kinésithérapeutes à dos, de préciser « non thérapeutique et non médical » et de souligner ensuite « sensuel mais non sexuel ». A ce rythme, ce ne sont plus des cartes de visites qu’il nous faudra mais des formats A4 !

 

 

_tirementpost2.jpg

 

Partager cet article
Repost0
13 novembre 2012 2 13 /11 /novembre /2012 09:35

 

 

Je me demandais dernièrement : après plus de quarante années de vie professionnelle, au cas où un proche viendrait à me demander conseil, est-ce que je lui conseillerais de devenir kiné.

 

Je pense que je lui répondrais par la négative !

 

J’ai été heureux dans mon métier mais j’ai aussi assisté, régulièrement, insidieusement, à sa lente mais inéluctable dégradation.

 

Pour pouvoir être disponible et à l’écoute des patients, il faut se sentir solide dans sa vie, dégagé de tous soucis, au moins financiers.

 

Il y a encore vingt ans, il était possible de s’occuper de chaque patient, d’être à son écoute, de passer du temps avec lui. Les honoraires n’ont pas suivis les augmentations des charges, du coût de la vie. Si un jeune kiné veut actuellement s’en sortir on lui propose, soit de tricher, soit de faire autre chose !

 

 

DSC03007.JPG

 

 

Tricher : c’est la solution adoptée par de nombreux confrères qui font défiler les patients d’appareil en appareil sans même assurer un suivi minimum. Je ne pense pas qu’on puisse faire un travail correct en restant cinq à dix minutes avec une personne. En tout cas, je ne sais pas le faire…. mais je suis peut être un mauvais kiné !  Mais je ne jette pas la pierre à ces confrères. Moi, j’ai connu « la belle époque » de mon métier, je suis propriétaire de mon appartement, de mon local professionnel…et je me dis qu’avec mes habitudes de travail (un rendez-vous toutes les demi-heures) actuellement je ne pourrais pas m’en sortir si j’avais des loyers ou des remboursements d’emprunts à assumer, des enfants en fac, une femme sans revenus….Et je ne parle pas de « triches » bien plus graves comme de facturer des séances non faites, les journaux et la télé en parlent assez et en arrivent à faire penser que ces délits quand même exceptionnels sont monnaie courante dans la profession!

 

Faire autre chose : c’est ce que j’ai choisi en suivant une formation d’ostéo et en passant mes diplômes d’esthéticien-cosméticien. Un massage relaxant est facturé, en moyenne, deux fois une séance de rééducation d’un genou (tarif ramené au temps passé)! Une séance d’ostéopathie peut être facturée jusqu’à trois fois une séance de rééducation vertébrale. Petit à petit, les kinésithérapeutes se sont vu imposer des choix de reclassements professionnels pour s’en sortir. Est-ce vraiment une solution ?

 

Je me souviens de la première fois où j’ai vu dans une revue professionnelle une publicité pour un nouvel appareil : on ne montrait pas l’appareil mais un carnet de rendez-vous avec des noms et un revenu à côté (madame Martin : 60 francs, madame Dupond : 60 francs et ensuite madame Robert 500 francs et juste à côté le nom de l’appareil). Il était clair qu’on passait du libéral au commercial, du médical au marchand de soupe !

 

On est rentrés dans un cercle infernal : les soins sont malheureusement trop souvent mal assurés, les résultats sont moins bons et la sécurité sociale en est à nous imposer des « références opposables » en limitant par exemple une rééducation d’entorse de cheville à dix séances ou une rééducation lombaire pour rachialgie à quinze séances. Un jour où l’autre sera créé le diplôme d’aide kiné qui, comme cela l’a été avec les aides-soignantes pour les infirmières, va amputer d’autant notre champ de travail. Par exemple, les personne âgées ne seront plus rééducables mais bénéficieront de séances d’entretien donc de soins hors kinési… Les centres de rééducation avec un kiné et cinq ou six aide –kinés vont se multiplier (comme les SSIAD pour les soins infirmiers) et comme les patients ne se multiplient pas comme les petits pains, les kinés vont avoir de plus en plus de difficultés à s’en sortir…sauf à tricher où se recycler : la boucle est bouclée !

DSC03004

La solution est évidente, mais inapplicable en l’état actuel du financement de la sécurité sociale : réévaluer les honoraires comme devraient l’être ceux de tout le monde médical et paramédical ! Un rêve en période de crise!

 

On demande à un kiné de se déplacer au domicile du patient pour 2.50 euros, le médecin se déplace pour 10 euros et le plombier pour 45 euros : cherchez l’erreur ! Sans vouloir s’aligner sur le plombier, imaginez-vous le trou de la sécu avec des honoraires décents.

 

Le chiffre d’affaire moyen des kinésithérapeutes des Bouches du Rhône a été de 74208 euros en 2011 (source : SNIR CPAM du 28/03/2012), le montant moyen des frais est de 52% (source ARAPL) ce qui fait un revenu moyen de 35620 euros par an. On se situe, avant déduction des frais, à peu près 6000 euros par mois pour une moyenne de 200 heures de travail…on est à 30 euros de l’heure quand le garagiste facture 61 euros et l’informaticien 80 euros de l’heure!). Une fois déduits les frais professionnels, le revenu moyen du kiné tourne aux alentours de 15 euros de l’heure…pas très loin de celui de la femme de ménage !

 

J’ai vécu une période de pain blanc, maintenant on a notre pain noir, y aura-t-il encore du pain dans quelques années pour notre profession ? Je ne suis pas optimiste pour mes jeunes confrères, ni globalement pour la médecine mais n’est-ce pas le lot de beaucoup d’autres professions ?

 

 

 

 

Source : alternative économique.

EVOLUTION de tarifs en euros

1991

2011

augmentation

SMIC

4.98

9.19

184.54%

ESSENCE

78

1.49

191.03%

PAIN AU KG

2.12

3.44

162.26%

M3 EAU

1.56

3.01

192.95%

Consultation médecin

14

23

164.29%

ACTE KINE AMK

1.65

2.04

124.24%

Partager cet article
Repost0
28 octobre 2012 7 28 /10 /octobre /2012 14:54

Depuis plus de quarante ans, j’exerce ma profession de kinési ! C’est un sacré bail…….Et je peux faire un retour sur ce qu’a été ma vie professionnelle.

 

Il y a eu des moments merveilleux, d’autres moins.

 

Quand j’ai choisi ce métier (parce que, contrairement à beaucoup de collègues qui, à l’époque, se retrouvaient en kiné après avoir raté médecine et qui ne se retrouvaient là qu’à cause de l’échec), j’étais plein d’espoir et d’enthousiasme. J’allais soigner, et peut être participer à la guérison, de malades. J’y crois toujours….mais l’enthousiasme est passé !

Des fois, je repense aux petites phrases prononcées ici où là qui m’ont un peu remis les pieds sur terre, pour ne pas dire plombé.

 

Les rapports avec les médecins.


Dans le genre gentillesse, la plus belle phrase entendue de la bouche d’un médecin a été : « les kinésis sont à la médecine ce que les charançons sont aux haricots ». J’avais déjà eu droit de la part d’un médecin, en entrant dans un service hospitalier « n’oubliez jamais que vous n’êtes qu’auxiliaire médical ». Au moins c’était clair, les médecins ne sont pas tous ravis de nos services. J’ai eu aussi dernièrement une autre marque de ce mépris. Un médecin a prescrit à un patient une séance de kinésithérapie : vous avez bien lu « une » ! Et la rédaction valait son pesant d’or : « montrer à son épouse comment le masser » ! Mon grand regret est de ne pas en avoir gardé une copie avant de mettre le patient et sa femme à la porte en leur disant d’aller une fois chez leur médecin pour  lui demander de leur apprendre à se soigner par eux-mêmes. On a aussi les médecins qui nous tartinent une page de conseils, d’explications, d’ordres…pour bien montrer qu’il faut obéir à la lettre et que si le résultat n’est pas là, ce sera de notre faute parce que bien souvent, en une demi-heure que doit durer la séance, il est totalement impossible de faire tout ce qu’ils demandent.

 

Quand on est kiné, il faut de suite se mettre dans la tête que si le résultat est bon c’est parce que le médecin a parfaitement cerné le problème et si le résultat n’est pas satisfaisant c’est parce que le kiné a mal fait son travail ! Après ça, on n’est jamais, ni surpris, ni déçu.

 

Les rapports avec les patients.

DSC02999.JPG


On a aussi, et de plus en plus, les petites phrases lancées par les patients. Je me souviens d’une dame qui me disait un jour : « mon fils, il n’est pas doué pour les études mais il aime bien aider les gens : c’est dur le CAP de kiné ? Je pense que ça lui irait bien ! » Je lui ai répondu que c’était très facile dès qu’après le bac et une année de médecine on réussissait le concours qui nous permettait de nous taper encore trois années d’études.

J’ai eu aussi un masseur bien-être qui se demandait pourquoi on faisait tant d’études alors que lui, après une formation en deux semaines, il faisait le même travail.

Une patiente me parlait un jour de son ancien kiné. Il n’était pas pareil, lui, il avait un don. Je lui ai fait son compte et l’ai renvoyée d’où elle venait. Même pas un mois après elle me rappelait parce que son masseur avait perdu son don. Je ne l’ai pas reprise pour tout ça, elle cherche peut être encore un kiné qui ait ce don !

Et il y a aussi, pour nous remettre les pieds sur terre les appels téléphoniques du genre : « je ne peux pas venir cet après-midi, je vais chez la coiffeuse, il ne lui restait que cette place ». On voit l’ordre des urgences ! Une autre patiente avait raté un rendez-vous. Elle m’appelle le lendemain. Je lui demande « ah, oui, vous voulez vous excuser pour la séance ratée d’hier ? » et elle me répond « oh non, je voulais juste reprendre rendez-vous ! ». Au moins c’est clair et précis : elle me prend pour de la merde !

Dans le genre désagréable il y a aussi les remarques du style « vous pouvez marquer la séance même quand je ne viens pas, j’ai la CMU, j’en ferai remarquer pas le médecin ». En clair, je viens quand je veux, comme je veux, si je veux et vous ne pourrez pas râler, vous serez payé quand même. On n’est plus dans le domaine du soin mais dans celui des loisirs : « tiens, j’ai rien de mieux à faire aujourd’hui, je vais aller chez le kiné ! ».

J’ai aussi d’une dame des quartiers chics qu’un spécialiste m’avait adressée. Elle m’a sorti un jour qu’avec ses amies du bridge, elles s’étaient amusées de voir un grand professeur adresser ses patientes chez « un petit kiné ». Le fait est que je n’ai rien de bling-bling, ni dans ma façon de me comporter, ni dans le décor du cabinet, je ne joue pas dans la même cours et privilégie le soin et l’hygiène au décor. En tout cas, elle en a redemandé et je la revois de temps en temps….et j’ai même récupéré des copines à elle qui viennent s’encanailler dans mon quartier!

 

DSC03004.JPG

Ces quarante années d’expériences diverses et variées m’ont fait prendre beaucoup de recul et, si on prend aussi en considération (et ce n’est pas négligeable !) l’effondrement de nos tarifs par rapport au coût de la vie (en 1985, le SMIC horaire était à 3.89€ et l’AMM à 1.53 €, en 2012 on a un SMIC à 9.40 € et un AMK à 2.15 €, cherchez l’erreur!), je comprends que la profession ne soit pas très optimiste quant à son avenir. Mais je suis encore content de venir bosser le matin et je ne regrette vraiment pas un instant d’avoir choisi ce métier… même si je pense qu’à l’heure actuelle, si j’étais jeune et en recherche d’avenir,  j’hésiterais à faire le même choix.

Partager cet article
Repost0

Articles RÉCents