Nous vendons chaque jour du bien être en étant persuadé de participer au bonheur des client( e)s. Mais est-ce aussi clair que ça nous semble évident ?
Cette chasse au bonheur par le travail sur soi : coaching, sport, massages, voyages est relativement récente. Elle correspond à la philosophie du behaviourisme de renforcement ou de modification des conduites personnelles pour se rapprocher de la « perfection ».
Tout est mis en œuvre pour nous aider à y arriver : connexion de nos appareils qui nous aident dans la réalisation de nos buts : applications sur les smartphones, calcul des calories ingurgitées, des calories éliminées, décompte des pas réalisés…. La publicité participe aussi au développement de toutes les techniques et soins qui sont censés être utiles, voir indispensables, pour atteindre notre but. Tout ce qui est détox en est un bon exemple.
Le problème est que très souvent, on vend du vent et que ce marché est devenu hyper lucratif pour certains mais fait entrer les client (e)s dans un engrenage sans fin puisqu’ils et elles veulent à tout prix des likes sur leurs photos de FB où des compliments de leurs employeurs, clients ou proches.
Il suffit de se documenter un peu sérieusement pour voir qu’une grande partie de ce qui fait notre activité repose sur des croyances et est démolie par la science. A l’heure actuelle où tout est sujet à études randomisées, peu de nos soins y échappent et notre travail est sérieusement remis en question.
Le problème est justement là : les résultats sont rarement au rendez-vous et, avec le temps, de plus en plus de personnes vivent une frustration qui les conduit inéluctablement à un mal être ou parfois même à un état dépressif. Les résultats ne s’inscrivent que très rarement dans la durée. On le sait très bien par exemple sur les problèmes de surcharge pondérale : on sait faire maigrir une personne mais si elle relâche ses efforts, c’est le retour à la case départ. Un livre sur les régimes commençait par ce constat : « depuis que je suis des régimes, j’ai bien dû perdre une tonne ! » Kilos repris aussi vite que perdus si, pour des raisons de moral ou de santé, on laisse le régime de côté.
La société nous impose une image, un look, un dynamisme, une présence que nous n’avons pas tous naturellement. Nous ne sommes pas tous maigres, beaux, blancs, spontanément souriant : autant de critères qui peuvent nous poser des problèmes d’intégration dans la société par une ségrégation. Et, en tant que praticiens bien être, nous participons, encourageons, ce système. Je plains les filles qui, du matin au soir reproduisent les mêmes sourcils, les mêmes ongles : on va vers une uniformisation alors que chaque personne est différente.
Il est évident qu’une personne dynamique, souriante, sportive, détendue… aura plus de facilités à réussir dans le monde du travail et au niveau de sa vie relationnelle mais il faudrait aussi que nous sachions nous éloigner des stéréotypes imposés par la société pour sécuriser les personnes qui n’ont pas la chance ni la possibilité de pouvoir se glisser dans le moule. La recherche permanente du mieux-être, du mieux paraitre, nous amène à nous rendre responsable de nos échecs alors que, malheureusement, l’échec est une chose naturelle et que ça peut arriver même aux meilleurs. On ne peut pas être bon en tout et tout le temps. Tout le monde ne peut pas être une star, il faut l’admettre.
Dans la société actuelle, l'ésotérisme a remplacé la religion et le charlatanisme la science. Pas sûr qu'on y gagne au change. Les esthéticiennes et esthéticiens sont devenues médiatrices et médiateurs de cet ésotérisme et de dérives sectaires, plus soucieux de notre apparence que de notre âme. Est-ce vraiment notre vocation ?
Cette pression qui nous est imposée par la société, cette uniformisation, sont à l’opposé de ce qui devrait être notre but : un épanouissement individuel avec nos différences. C’est à cela que notre passion devrait conduire pour le bonheur de tous dans nos particularités. Je pense que c’est un beau et bon sujet de réflexion pour celles et ceux qui ont entre leurs mains l’avenir de notre métier. On s’est fait avoir en rentrant dans le moule, réagissons !
Les appareils de pressothérapie sont maintenant en vente libre sur certains sites de vente en ligne, ils sont utilisés de façon courante dans les instituts de beauté et les centres de mise en forme et de « bien-être ».
Depuis un demi-siècle, nous avons donc pu observer une grande évolution dans l’utilisation de ces appareils.
Il y a un demi-siècle, la pressothérapie était pratiquée sous surveillance médicale et interdite, entre autres, aux kinésithérapeutes dans leurs cabinets. Qu’est-ce qui justifiait cette limitation à son usage ?
La première raison est que les appareils étaient conçus différemment : les bottes étaient constituées d’un seul module, et se gonflaient d’une façon uniforme du pied au plis de l’aine. Si la personne avait de grosses cuisses, on avait donc un garrot qui se constituait à ce niveau et la pression sur le reste du membre n’intervenant qu’après, il en résultait parfois d’importants hématomes dus à la surpression sur des veines qui se trouvaient avant le garrot.
L’autre raison était qu’avant toute séance de pressothérapie, on prenait la tension artérielle du patient car la pressothérapie est contrindiquée en cas d’hypertension avec un risque de rupture d’anévrysme. La prise de tension étant alors considérée comme un acte médical, seuls les médecins avaient donc le pouvoir de décider si la séance était envisageable ou non.
Dans les années 1980, un nouveau type d’appareil est arrivé sur le marché : la pressothérapie étagée. Ces nouveaux appareils avaient des bottes constituées de plusieurs modules qui se gonflent les uns après les autres, en partant du pied pour arriver progressivement à la cuisse : le risque de surpression était donc diminué. La prise de tension n’était plus obligatoire mais seulement conseillée, et tous les professionnels paramédicaux avaient la possibilité de prendre la tension pour pouvoir éventuellement suivre les patients et aiguiller les hypertendus chez un médecin. La prise de tension n’était plus considérée comme un acte médical réservé aux seuls médecins, elle était autorisée aux paramédicaux. Depuis les années 1990, les patients eux même se sont équipés d’appareils pour suivre leur tension artérielle, et peuvent consulter le cas échéant leur médecin en cas de tension trop élevée.
Cependant, petit à petit, avec la multiplication des ventes des appareils de pressothérapie, on a « oublié » ce risque éventuel et plus personne ne respecte cette mesure de prudence élémentaire que constitue la prise de tension avant chaque séance.
Principe d’action de la pressothérapie.
La pressothérapie est utilisée dans les cas de stase veineuse remplace souvent le massage circulatoire des membres inférieurs. Le résultat visuel est spectaculaire et la diminution des œdèmes des membres inférieurs est très rapide à obtenir et, ce qui ne gâche rien, c’est un soin « mains libres » qui permet de recevoir deux personnes en même temps donc d’augmenter les recettes sans trop de temps utilisé.
Nous voyons donc qu’au premier abord, l’utilisation de ces appareils semble être un plus non négligeable à la fois au niveau du soin et au niveau des finances dans un institut.
Attention : tout n’est pas aussi évident.
Concernant la circulation de retour veineux, ce n’est pas aussi schématique. Les études menées ces dernières années sur le massage circulatoire des membres inférieurs montrent que les pressions glissées profondes, largement utilisées dans ce type de soin, sont loin de tenir leurs promesses et peuvent même souvent malmener les veines profondes au niveau musculaire. Ainsi, il est fortement conseillé aux kinésithérapeutes de préférer les pétrissages et, ce qui semble encore plus efficace, de ne pas masser mais de faire travailler les muscles ce qui donne de meilleurs résultats ! En effet, quand le muscle travaille, il se gonfle, il augmente la pression locale vu que le muscle est limité dans son expansion par les aponévroses et on obtient une nette augmentation du volume de sang mobilisé tout en respectant la physiologie de la circulation veineuse et artérielle.
L’autre problème que l’on a eu tendance à oublier en se focalisant sur le retour veineux, c’est que la circulation artérielle est, elle aussi, impactée par la pressothérapie et cette circulation artérielle se fait dans le sens inverse de la circulation veineuse ! Si l’exercice physique favorise aussi bien la circulation veineuse que la circulation artérielle, ce n’est pas le cas de la pressothérapie et du massage circulatoire.
En conclusion, je dirais qu’on a un appareil séduisant, facile d’utilisation et qui donne un résultat spectaculaire à l’œil nu. Un appareil qui plaît à la clientèle, mais qui présente aussi pas mal d’inconvénients. Le résultat obtenu n’est pas durable : c’est le principe de l’éponge qu’on presse mais qui va se gorger à nouveau d’eau dès qu’elle pourra en trouver. Une bonne marche aura une action plus durable et plus générale sur tout l’organisme sans aucun risque secondaire. J’ai eu ce genre d’appareil pendant des années en tant que kiné puis esthéticien, mais avec le recul je pense qu’aujourd’hui, j’investirais plutôt dans un tapis de marche pour les personnes qui ont besoin de se sentir encadrées (et n’ont pas l’envie ou le courage d’aller chaque jour marcher un moment !). Parmi cette clientèle, nous retrouverons les sportifs en salle qui prennent systématiquement les escalators ou l’ascenseur quand il y en a un, ou la personne qui vient en voiture à la salle de sport pour faire du vélo d’appartement et marcher sur un tapis électrique.
Ce qui me semble également gênant, c’est qu’une fois encore en pratique du « bien-être », on peut soulager des douleurs, apporter un confort qui risque de cacher pour un moment un véritable problème sous-jacent et donc retarder un diagnostic médical. Cela peut donc entraîner une perte de temps que l’on pourrait éviter pour enclencher un soin qui résoudrait le problème : on agit ainsi sur l’aspect visible en ignorant potentiellement son origine.
Le monde de l’esthétique et du bien-être : serions nous schizophrènes ?
Pendant des années j’ai enseigné dans une école d’esthétique et assuré des cours à des kinés. Depuis une dizaine d’années, je traine sur les forums d’esthétique et très régulièrement, je me demande si nous ne serions pas schizophrènes ! En effet, très souvent, dans l’approche de notre pratique, les symptômesdissociatifscorrespondent à une désorganisation de la pensée, des paroles, des émotions et des comportements corporels.La cohérence et la logique du discours et des pensées sont perturbées.
En effet, nous travaillons sur un corps, un visage, une peau et il faut reconnaitre que sans cesse nous détruisons tout ce qu’on peut avoir de positif en naturel à ces niveaux pour le remplacer par autre chose que nous apportons et que nous souhaitons souvent le plus naturel (bio) possible.
Par exemple, nous conseillons les gommages donc une destruction du film hydrolipidique, pour vite le remplacer par des crèmes qui sont censées le remplacer. Nous luttons contre des toxines sans très souvent savoir ce qui se cache derrière ce mot générique pour ensuite essayer de corriger de façon artificielle ce qui était signalé à l’organisme par cette augmentation physiologique de ces toxines. Il en est des toxines la même chose que pour les microbes: il y a les pathogènes et les saprophytes. Donc "détoxifier" peut très souvent devenir dangereux. Nous luttons contre des tensions qui sont la conséquence de possible pathologies sans pour cela nous occuper de ces pathologies (ce n’est pas notre rôle mais celui des médecins, des kinés et éventuellement des ostéopathes).
En gros nous remplaçons ce que nous avons détruit, nous supprimons les alertes naturelles de l’organisme sans pouvoir connaitre l’origine de ces alertes et, ce qui est plus grave, sans corriger l’origine du mal.
Il existe une autre façon de penser, une autre approche du soin. Les soins asiatiques, par exemple, sont plus souvent axés sur un renforcement des défenses naturelles de l’organisme que sur le remplacement du naturel par de l’artificiel. Ces «soins » (volontairement entre guillemets) ne sont pas là pour guérir mais pour essayer de ne pas être malade. Les médecines chinoise et indienne par exemple ont montré leurs limites depuis des millénaires au niveau thérapeutique puisque que ce soit en Chine ou en Indes, l’espérance de vie n’était, il y a trente ans, que 55 ans alors que nous étions déjà à 75 ans en Europe. Par contre, pour ce qui est du bien-être, il y a des tas de choses qui sont chez eux d’une efficacité inégalée. Leur comportement vis-à-vis de leur peau, de leur corps n’a jamais été de l’agressivité mais de l’accompagnement et quand on voit le résultat, il n’y a pas photo !
Nous connaissons, depuis un demi-siècle, dans notre façon d’appréhender les soins esthétiques (et rééducatifs pour les kinés) une fuite en avant, une course à la performance qu’on pense obtenir avec des produits de plus en plus destructeurs et agressifs et des appareils traumatisants.
Prenons un exemple tout bête : le gel de douche ! Il y a 50 ans, on se douchait en moyenne deux fois par semaine (pour les plus aisés) avec du savon. Quand on avait pris notre douche, on passait un bon quart d’heure à tout nettoyer. Maintenant on trouve normal de se doucher au moins une fois par jour avec des produits tellement détergents qu’il suffit de passer le jet sur le bac pour le nettoyer : imaginez vous ce que ça peut avoir comme effet sur notre peau ! Adieu les protections naturelles….Alors on se passe des crèmes pour rattraper et remplacer ce qu’on vient de détruire.
Alors si on essayait de remettre en question nos pratiques afin qu’elles soient moins traumatisantes pour notre organisme ? Vaste programme !
Le développement de différentes méthodes en esthétique, que ce soit en soins esthétique ou en massage, l’apparition de nouveaux appareils, le désir de reconnaissance des professionnels de la beauté et du bien-être a permis l’intrusion dans la pratique de notre profession des médecines douces et des médecines alternatives.
Beaucoup, parmi nous, se considèrent comme des thérapeutes. On part donc du principe que nos client(e)s souffrent de pathologies et qu’on se doit donc de les soigner. Par exemple, on est passé du modelage au massage il y a une dizaine s’années pour se considérer comme massothérapeute maintenant. Il y a parmi nous des tas de thérapeutes : sylvothérapeutes, litho-thérapeutes, ostéothérapeutes… Le fait d’ajouter « thérapeute » souligne le fait que nous soignons.
Et tout naturellement, les médecines alternatives se sont glissées dans nos pratiques.
Nous allons dans un premier temps rappeler par les définitions même des mots ce que cette intrusion modifie dans notre vocabulaire et sous-entend dans nos pratiques. Puis en prenant l’exemple de la Programmation Neuro Linguistique, nous essaierons de voir ce que ces méthodes peuvent nous apporter et en quoi elles peuvent modifier à la fois notre approche du métier, nos comportements et nos soins.
DEFINITIONS.
THERAPIE :
« Partie de la médecine qui s'occupe des moyens - médicamenteux, chirurgicaux ou autres - propres à guérir ou à soulager les maladies. »
Cette définition tirée du Larousse indique que d’une part on est dans le domaine de la médecine et que d’autre part on se trouve face à une maladie. Donc faire une thérapie nécessite d’avoir au préalable porté un diagnostic et d’autre part à avoir choisi le soin le plus approprié pour résoudre le problème de santé qui se présente devant nous.
BIEN ÊTRE :
« La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. »
Cette définition établie par l’Office Mondial de la Santé englobe donc de fait tout ce qui peut améliorer notre sentiment d’être bien. Nous sommes les seuls à pouvoir définir notre bien-être. Chaque personne est différente, unique, et sa notion de bien-être sera différente de toutes les autres. En réalité, le bien-être ne se ressent que par opposition au mal-être et c’est ce signe qui va nous servir à la fois de curseur et d’alarme. Le mal-être nous indique qu’il faut rechercher la cause de cet état et tout faire pour y remédier avant qu’il ne nous conduise à un état pathologique.
On peut ressentir un état de fatigue sans pour cela être dans un état de mal-être et vice versa. C’est pourquoi, lorsque nous nous trouvons face à une personne qui demande un soin de bien-être il faut pouvoir étudier se demande : besoin de détente physique après efforts ou fatigue, demande d’un moment de « décrochage », état de mal-être… ? La solution que nous pourrons apporter sera différente pour chaque demande.
L’état de mal-être n’est pas une maladie, c’est la sonnette d’alarme. Il faut donc avoir conscience qu’un soin va pouvoir, suivant le cas, être plus mauvais que bénéfique puisqu’on risque d’arrêter l’alarme sans pour autant résoudre le problème de fond. C’est le problème posé par toutes les thérapies brèves.
ETUDE RANDOMMISEE :
Au niveau scientifique, une étude randomisée est une étude menée en double aveugle.
On prend un échantillonnage de X personnes ayant la même pathologie ou le même état, on le divise en deux. Un groupe recevra le soin et l’autre un placébo (produit inefficace) et on étudie les effets produits sur les deux groupes.
Si tout le monde n’a eu aucune réaction c’est que le soin proposé ne sert à rien. C’est la même chose si tout le monde sent une amélioration ! Dans le second cas on voit que la pathologie a disparue spontanément sans soin donc qu’il est inutile de traiter pour obtenir une disparition de cette pathologie.
EFFETS PLACEBO ET NOCEBO :
« L’effetplacebo correspond au résultat psycho-physiologique positif (bénéfique) constaté après l'administration d'une substance ou la réalisation d'un acte thérapeutique, indépendamment de l'efficacité intrinsèque attendue du traitement. »
En gros, on donne à une personne un médicament dont on sait qu’il est totalement inefficace et si la personne se sent mieux, c’est qu’elle a réagi purement psychologiquement au soin. On sait que tout traitement est plus efficace si la personne qui le reçoit a confiance en la personne qui le prescrit et si elle considère le soin comme efficace.
« L’effet nocébo », c’est l’inverse. Sila personne qui reçoit le soin n’y croit pas, ce soin perd en efficacité.
Une étude randomisée remarquable a été faite aux USA et au Canada qui portait sur plus de 5000 personnes. On avait des volontaires pour se faire vacciner contre la Covid. La moitié était antivaccin, l’autre moitié pro-vaccin. Chacun des lots a été divisé en deux et on a vacciné avec le vrai vaccin ou de l’eau distillée la moitié de chaque lot. A la sortie, 64% des antis ont eu une réaction négative (douleur, fièvre, nausée, vertiges…) contre à peine 6% des pros ! C’est l’effet nocébo qui a joué : les antis ont analysé toutes leurs réactions pendant des jours en attendant le problème, les pros ne se sont pas posé la question.
On voit donc clairement que la réaction de confiance face au soin et à la personne qui le réalise ou le prescrit aura une grande importance pour le résultat de ce soin.
CHARLATANISME :
Un charlatan est une personne « prétendant de manière frauduleuse ou par ignorance disposer de compétences médicales » ou « une personne qui prétend, professionnellement ou publiquement, posséder des compétences, des connaissances, des qualifications qu'elle ne possède pas ».
Cette définition correspond malheureusement très souvent à ce qui se passe au niveau du bien-être. Une personne juge de l’état de santé d’une autre personne sans en avoir les compétences. Trop souvent, la personne qui prodigue le soin part avec des aprioris totalement faux : « cette personne est en souffrance », « elle est intoxiquée », « elle est dépressive », « elle n’est pas bien »…. Et cet apriori va guider un soin qui ne sera pas forcément adapté. Et, plus grave, faire disparaitre le problème, s’il existe, va parfois aggraver le cas puisqu’il effacera des symptômes qui pourraient permettre à un médecin d’agir plus efficacement et rapidement.
DERIVE SECTAIRE :
« La dérive sectaire est un dévoiement de la liberté de pensée, d'opinion ou de religion qui porte atteinte à l'ordre public, aux lois ou aux règlements, aux droits fondamentaux, à la sécurité ou à l'intégrité des personnes. » (Définition de la MIVILUDES).
Le bien-être est une possibilité évidente de favoriser ces dérives et 40% des dérives sectaires signalées en 2021 à la Miviludes sont dans le domaine médical et particulièrement le domaine du bien-être. Ce problème ne touche que très peu les petits instituts mais est de plus en plus présent dans le domaine de la formation. En réalité, pratiquement, la dérive sert à colporter de fausses informations ou des méthodes considérées comme du charlatanisme pour tirer des avantages souvent financiers aux personnes qui sont dans cette dérive.
APPORTS DE CES SOINS DANS L’APPROCHE DU BIEN ÊTRE. EXEMPLE : LA PROGRAMMATION NEURO LINGUISTIQUE
La Programmation Neuro linguistique est apparue dans les années 1970-1980. Elle a été créée par John GRINDER et Richard BANDLER. Elle a connu depuis de nombreuses évolutions et variations et a fait l’objet de nombreuses études qui ont invalidé la plupart de ses applications, mais a surtout permis d’approfondir notre compréhension du système cognitif et de son implication dans notre représentation du monde et nos interactions sociales. Le système cognitif est le système qui reçoit les différentes informations et qui les traite en fonction de son être, de son passé, de sa mémoire, pour y répondre par une action.
Ce système est donc particulier à chaque personne et c’est l’étude des différents types qui constitue la base de la PNL
La PNL a ainsi permis de modéliser et de fournir une première grille d’analyse sur les comportements humains, la transmission de l’information et les apprentissages.
Depuis, de nombreuses disciplines se sont développées à partir de ce domaine de recherche et, à mesure que nos connaissances en matière de fonctionnement du cerveau humain se sont étoffées, les applications se sont diversifiées et ont progressivement envahi notre quotidien dans différents secteurs d’activités, comme par exemple : les entretiens d’embauche et les ressources humaines, la politique, la communication publicitaire et l’étude des comportements d’achat, le « traitement de sources humaines » dans le renseignement, l’interrogatoire de police et la négociation, et plus particulièrement dans le secteur du bien-être et les thérapies brèves( EMDR oudésensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires , Hypnose, Techniques d’Optimisation du Potentiel etc….)
La PNL a été abandonnée dans de nombreux secteurs et, avec l’arrivée de nouvelles techniques, a laissé la place à d’autres méthodes. Le développement de l’informatique et des réseaux sociaux ont permis d’affiner certaines méthodes et technique en offrant un échantillonnage plus important. C’est tout l’apport des algorithmes.
Ces algorithmes nous permettent de mieux comprendre l’interaction entre les personnes, entre les différents groupes. Les études comportementales permettent aussi de mieux comprendre l’impact des résultats des soins (que ce soit en médecine ou dans le bien-être) au travers du prisme de la relation soignant-soigné
« Vous soignez autant par ce que vous êtes, que ce que vous faites »
Nous disposons désormais d’un grand nombre d’études et surtout de méta-analyses dans le domaine des soins et en particulier du massage. Il existe une multitude d’approches de ces soins et aucun ne peut se prévaloir, pour une même attente du client d’une efficacité supérieure aux autres. Il en est de même en ce qui concerne les conseils d’hygiène et de diététique.
Nous sommes tous persuadés de procéder la bonne méthode, la bonne approche bien que nous soyons toutes et tous différents dans nos soins et nos conseils.
Il nous semble évident que la relation soignant-soigné soit pour une part importante dans le résultat du soin. Pourtant, il aura fallu l’approfondissement des études par la PNL pour qualifier ce phénomène. Nous agissons de façon purement intuitive, la PNL a analysé cette façon d’agir sous le filtre comportemental.
En tant que débutant, nous avons souvent des déceptions quant au niveau des résultats espérés et, avec le temps, nous nous constituons une clientèle qui est de plus en plus fidèle, de plus en plus contente des résultats. Nous avons bien sur progressé mais il faut aussi tenir compte du fait que notre clientèle se fait beaucoup par le bouche-à-oreille et que nous fidélisons des personnes qui nous ressemblent, qui sont dans la même « bulle » que nous. Par exemple, si vous êtes plutôt manuel, vous n'attirerez pas les personnes qui croient que les dernières technologies vont avoir des résultats miracles et, à contrario, si vous mettez vos client(e)s sous appareil vous verrez fuir celles et ceux qui aiment le contact manuel. C’est aussi ce qui peut arriver avec les « bon cadeau ». Une personne peut offrir un super massage à une amie, si celle-ci n’aime pas être touchée, ce sera un échec.
Nous aurons donc la possibilité de choisir les techniques qui nous correspondent, en lesquelles nous croyons, celles qui pour nous ont fait leurs preuves et ont donné entière satisfaction à nos client(e)s fidèles soit de plonger dans « notre boite à outil » et essayer de trouver ce qui semble le mieux adapté à la personne que nous recevons. La première approche donnera un résultat garanti, l’autre sera plus aléatoire d’autant plus que nous ne sommes pas, nous même, certain(e) du résultat.
La PNL a classifié les personnes en plusieurs profils différents, en huit grands groupes qui parfois s’imbriquent chez une même personne :
- Promoteur.
- Rebelle.
- Persévérant.
- Rêveur.
- Empathique.
- Analytique
- Traditionnel
- Favorable au changement.
La thérapie manuelle cognitive
Vous savez surement constaté, pour l’avoir vécu, que certaines clientes sont plus réceptives que d’autres aux protocoles de soins que vous mettez en place dans vos instituts. Certaines arrivent « en terrain conquis », envahissent l’espace, sont chez elles d’entrée ! C’est ce qu’on considère comme un profil « promoteur » alors qu’un profil rêveur sera plus réservé, timide, en retrait. Le rêveur aura besoin de calme, de se sentir seul. Il sera agressé par toute intrusion. Cette personne préfèrera le petit institut confidentiel au grand centre. Elle se sentira protégée. Elle fuit trop de stimulations qui l’éloignent de sa bulle de confort.
Un profil emphatique appréciera que la personne qui s’occupe de son soin lui soit entièrement dévouée. Ces personnes ont besoin de contact direct, ce sont des tactiles, des sensuelles. Elles demandent autant d’empathie qu’elles en ont pour les autres alors que l’analytique acceptera sans problème d’être mise sous appareils si on lui en a expliqué le fonctionnement. Elle a besoin d’avoir face à elle une personne ancrée, sure d’elle et de sa méthode.
Les « persévérants » veulent du concret ! Ils aiment avoir en face d’eux une personne qui en impose. L’affichage des diplômes est apprécié et des photos de résultats de soins les impressionnent. Si vous avez un jour eu en soin une célébrité, ils seront enthousiastes et confiants : ils ont besoin de repères.
Si vous êtes face à une personne « analytique », le fait de montrer des résultats la sécurise alors que face à une « rebelle » le résultat sera inverse. La rebelle sera la cliente casse pieds qui questionnera sans cesse et essaiera de vous déstabiliser. Elle aura toujours connu la personne qui a dit le contraire de ce que vous expliquez et qui avait d’excellents résultats. On se demande même ce qu’elle fait chez nous puisque c’est mieux ailleurs !
Nous rencontrons aussi la cliente « changement » qui veut toujours la dernière technique sortie contrairement à la « traditionnelle » qui ne veut être épilée qu’à la cire recyclable ! C’est ce qu’on lui faisait il y a trente ans, ça marchait, il n’y a aucune raison de changer.
Profil n’est pas Personnalité !
Mais attention, ces profils décrits sont différents de la personnalité de la personne. Dans les mêmes profils on peut rencontrer différentes personnalités. Chaque personne est différente et il faut bien se garder de schématiser trop vite en fonction du comportement.
Notre vécu modifie nos comportements. Notre comportement change aussi en fonction de la personne avec qui nous sommes. Nous n’agissons pas de la même façon avec nos conjoint(e)s, nos collègues, nos voisins… Combien de fois avons-nous entendu dire par un proche « ça, c’est pas toi, je ne te reconnais pas » ! Toutefois, quand nous avons identifié le groupe de la personne, il sera plus aisé de créer un lien et d’entrer dans sa bulle.
Le modèle CEPCoT (pour : Contexte, Ecoute, Profil, Communication, Traitement) tente de nous fournir les éléments de prise en charge.
Le principe est d’intégrer les dernières avancées en matière de science cognitive à notre prise en charge habituelle :
Contexte : en intégrant dans notre cadre de consultation (rdv, salle d’attente, tenues etc..) les facteurs contextuels qui vont influencer inconsciemment notre clientèle dans le sens de son propre intérêt. On parle de « Nudge » ou « coup de pouce » en français.
Ecoute : en adoptant la posture de praticien la plus congruente possible avec les besoins de notre patient tout en nous préservant de certains comportements manipulateurs ou toxiques. Tout ça en intégrant simplement quelques questions supplémentaires lors de notre questionnaire et en observant notre patient de manière plus « spécialisée ».
Profil : savoir identifier le profil cognitif adopté par notre patient dans le contexte du soin pour adapter notre prise en charge et notre suivi en amont.
Communication : identifier le langage d’influence le plus adapté à notre patient pour s’assurer sa pleine adhésion dans sa prise en charge.
Traitement : Sélectionner la technique adaptée au profil du patient, à ses symptômes et son âge, et déterminer le protocole de soin le plus pertinent par rapport à sa demande, ses facteurs de motivation et ses critères.
En pratique, ça donne quoi ?
Lorsque nous sommes face à la demande, analyser comment elle a été formulée. Suivant la personne, les mots, le ton, la tournure de phrase, peuvent être totalement différentes pour une demande identique.
Il faudra adapter notre réponse à la demande non seulement par les actes mais aussi par la formulation. Un décalage dans le comportement ou le langage peut dresser immédiatement un mur entre le client ou la cliente et nous.
Si on sent une gêne ou une incompréhension, il faut rectifier le tir au plus vite.
Il faut aussi toujours avoir en tête que face à la cliente il y a nous qui avons notre propre profil. Il faut donc, comme le dit si bien l’expression, jouer « profil bas » pour ne pas s’opposer. Il faut savoir composer et « entrer dans le jeu » de la clientèle si on veut la séduire, la satisfaire et la garder…et ce n’est pas toujours facile.
C’est ce jeu de rôle qui fera qu’on va développer une clientèle qui, avec le temps, nous correspondra. Quand on est ancien dans le métier, on voit que la clientèle nous ressemble : nous nous choisissons mutuellement.
Un professionnel qui a une excellente pratique mais un profil particulier aura parfois plus de difficultés à réussir que le caméléon qui possède moins de qualités professionnelles. Quand « le courant ne passe pas », quelle que soit la qualité du soin, le client ou la cliente ne reviendront pas. Ils viennent chez nous pour du bien-être, pas pour être tendus, mal à l’aise.
Il ne faut pas aussi négliger les risques pris lors de nos prises de positions et attitudes. Si face à un persévérant vous commencez à parler de « fluides », de « magnétisme », « d’ondes », il risque fort d’être déstabilisé et si vous tentez de lui vendre des pierres en litho-thérapie , il sentira le coté sectaire de la méthode alors que d’autres seront ravis de cette offre. Ce qui est considéré comme « charlatanisme » au niveau médical correspond à une demande d’une certaine clientèle. L’effet placébo jouant, on est dans ce cas gagnant à coup sûr.
Mais il faut aussi considérer le coté dangereux des soins alternatifs et des thérapies brèves. S’ils correspondent à la demande de la personne, ils auront toujours un effet positif mais il ne faut pas négliger que cela risque de retarder un traitement plus conventionnel qui sera indispensable pour la guérison. Les petits troubles peuvent être le signal d’alarme de quelque chose de plus grave et il ne faut donc jamais les négliger. Les thérapies brèves peuvent aider à franchir un obstacle, parfois un second ou un troisième mais s’ils cachent une pathologie, elles font courir le risque d’une aggravation de la maladie. Et d’un autre côté, ces soins alternatifs peuvent éviter la prise intempestive de médicament ! C’est pourquoi il faut que nous soyons très prudents dans notre comportement pour ne pas imposer nos croyances à notre clientèle sachant que si elle « entre dans notre bulle » elle deviendra vulnérable : c’est ce qu’on appelle de la dérive sectaire.
Un article publié dernièrement par un organisme de presse professionnel indiquait qu’une nouvelle fois, c’est le domaine du bien-être qui est le plus signalé à la Miviludes (organisme chargé de la surveillance des dérives sectaires en France).
Cela n’a rien de surprenant quand on sait d’une part que la formation est entièrement libre chez nous et que ce n’est que la pratique de certains actes qui est réglementée.
Depuis 2010, très régulièrement on alerte sur les formations qui sont censées déboucher sur un avenir professionnel alors qu’elles sont nettement insuffisantes pour présenter la moindre assurance de sérieux et que parfois même les pratiques sont reconnues par la médecine comme étant du charlatanisme. Une formation en thérapie ayurvédique par exemple nous est proposée régulièrement sur internet en 28 modules que l’on peut suivre par correspondance ! En Indes, c’est des années d’études en présentiel : on ne joue pas dans la même catégorie !
Le charlatanisme est, au niveau médical, une pratique qui non seulement n’a aucune efficacité pour ce quoi elle est pratiquée mais qui, de plus est, est dangereuse pour la personne qui reçoit le soin. La définition de l’Ordre des Médecins en est : « Les thérapeutes ne peuvent proposer aux malades ou à leur entourage comme salutaire ou sans danger un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé. Toute pratique de charlatanisme est interdite ».
Il faut reconnaitre que les financeurs (Fafpea et/ou client(e)s) ne sont pas très regardants sur le contenu des formations et j’irai même plus loin, les formateurs eux même ne sont pas de mauvaise foi puisqu’ils croient à ce qu’ils font parce qu’ils ont eux même été formés à ces méthodes.
Une partie de nos formations débouche donc sur des pratiques inutiles voire même dangereuses qui entrent dans le domaine de la confiance et de la croyance et donc dans le domaine de la dérive sectaire telle qu’elle est définie par la Miviludes. Il n’y a donc rien de surprenant à ce que nous soyons montrés du doigt par cet organisme. Il n’y a, de toute évidence, de la part des formateurs et des esthéticiennes qui pratiqueront ces méthodes aucune volonté de domination sur la personne qu’ils (elles) traitent ou sur les personnes qui reçoivent leur soin donc pas le classique gourou qu’on imagine quand on parle de secte mais il y a, même si elle n’est pas consciente, une domination involontaire puisqu’on compte sur l’acceptation et la confiance de la personne traitée.
De nombreux formateurs tomberaient des nues si on leur disait que leur enseignement entre dans le cadre du charlatanisme et il me semble totalement impossible de faire le ménage dans les formations : à notre niveau, il faut considérer que nous sommes 90% à être totalement incapables de juger du bien fondé de ce qui est dit et si on faisait appel à des personnes compétentes, ce serait considéré comme une atteinte à nos libertés voire même à une mainmise sur notre profession.
Il convient toutefois de rester prudent(e ) quand on se lance dans ce qu’on appelle « thérapies alternatives » car si un ou une cliente perd confiance pour X raisons en nos soins, elle peut tout à fait penser qu’elle a été manipulée et abusée et se retourner contre nous. C’est ce qui explique que le bien être soit si souvent présent dans les plaintes à la Miviludes.
Il y a donc fort à craindre que nous fassions encore longtemps partie du groupe de tête parmi les signalements à la Miviludes.
Un ami m’a dernièrement demandé mon avis sur un certain nombre de centres de formation en massage que l’on peut trouver sur internet. Il envisage une reconversion éventuelle et se sent attiré par les massages.
Je suis donc allé voir ce qui était proposé. Cette recherche m’a fait pleinement comprendre ce que je ressentais et me mettait actuellement mal à l’aise face à ce que je vois de l’évolution dans le milieu du massage bien être.
Je me suis très souvent retrouvé face à ce qui est, pour moi, une des pires dérives possibles : une tendance à la sectarisation.
Malraux disait que le XXIème siècle serait mystique : on est en plein dedans. On efface d’un revers de main tout ce qui a été fait depuis les années cinquante, on oublie Mézières, Still, Struyf-Denys. On ignore l’anatomie, la physiologie, la pathologie.
On est revenu à une époque où n’étaient connus ni l’électromyogramme, ni l’IRM, ni le scanner, ni l’EEG. On parle de « réflexe » sans savoir ce que c’est, on se dit réflexothérapeute ou massothérapeute sans être capable d’établir un diagnostic. On soigne sans établir de diagnostic ! On en est revenu aux fluides, aux chakras, aux méridiens, au magnétisme… comme si cinquante ans de recherches, de découvertes, de travail n’avaient servi à rien : on se cramponne à l’obscurantisme et pour cacher l’ignorance on vend du rêve. Vendre du rêve, je ne suis pas contre, mais si on est conscient de ce que l’on fait, pas pour cacher ses lacunes.
Le langage employé est souvent très proche d’un langage sectaire. On a un « Maître », on suit un rituel. On utilise les grosses ficelles que je dénonçais il y a une quarantaine d’années dans mon mémoire de sophrologie « office religieux, technique sophronique » : encens, vibrations… tout ce qui nous permet de déconnecter le plus vite possible.
Et je ne parle pas des dérives de certaines formations pseudo-tantriques ou proches où on appelle la masturbation « massage lingam » et la pénétration « massage prostatique » ! Ces méthodes correspondent à une demande et je pense qu’elles ont toute leur place dans notre société mais le mélange des genres ne nous est pas favorable au niveau réputation et il faudrait que les appellations soient plus claires pour éviter les quiproquos.
Généralement, je ne regarde pas trop ce qui se passe ailleurs. Je ris devant les chorégraphies présentées au Congrès des Nouvelles Esthétiques et aux championnats de massages et ça s’arrête là. On résume le massage qui est avant tout en dialogue non verbal entre deux personnes à une chorégraphie. C’est un peu comme faire un discours en langue des signes devant un parterre de non-voyants ! En allant sur ces différents sites, je pensais entendre parler d’anatomie, de physiologie, de posturologie, de chaînes aponévrotiques et musculaires … pas me retrouver là où j’étais il y a cinquante ans. On enseigne le drainage lymphatique sans même évoquer les lois de Starling, on fait du massage de détente sans dire ce qu’est une lemniscate, sans parler des chaînes aponévrotiques et musculaires… Heureusement qu’on ne peut que très rarement faire du mal en massant une personne qui vient pour du bien-être et est censée ne pas souffrir de pathologie. Spontanément, si une personne aime masser, elle ne fait que rarement des choses qui sont désagréables ou dangereuses.
La visite de ces différents sites me conforte dans l’idée qu’il serait important et urgent de remettre les pendules à l’heure, d’exiger un minimum de sérieux et de connaissances de la part des formateurs et formatrices. Le massage est un Art mais comme tous les arts il nécessite une connaissance des outils pour atteindre, sinon la perfection puisqu’à l’impossible nul n’est tenu, mais au moins une compétence accrue.
Dès le début des études et formations en esthétique on a toujours considéré l’esthéticienne de base comme une parfaite idiote à qui on devait apprendre un certain nombre de « protocoles » avant de la lâcher dans la nature.
La plupart d’entre nous a donc suivi un certain nombre de formations pendant lesquelles on lui disait « tu fais ça, puis ça et ça pour terminer » et on considérait que c’était suffisant pour se lancer dans la nature et aller bosser. Cet enseignement qui, au début, n’était destiné qu’aux soins du visage, aux soins du corps à la beauté des mains et des pieds et aux épilations s’applique maintenant aux massages. On nous apprend des « protocoles » en partant du principe que nous sommes totalement incapables de réfléchir à ce que nous faisons et que nos connaissances théoriques sont nettement insuffisantes pour comprendre le pourquoi du comment.
C’est pourquoi j’ai envie de porter un autre regard sur certains soins.
UN AUTRE REGARD SUR L’EPILATION
1°) L'anatomie du poil
Les poils sont des phanères se présentant sous l'aspect de filaments cornés implantés obliquement dans le derme par invagination de l'épiderme. Les poils se composent donc d'une tige libre à la surface de la peau, ou poil proprement dit, et d'une partie invisible enchâssée dans le derme, la racine, dont l'extrémité en cupule (le bulbe) reçoit la papille vasculaire nourricière.
Le poil comporte des annexes : une glande sébacée, l'ensemble formant l'appareil pilo-sébacé ; le muscle érecteur, dont la contraction, sous l'influence du froid, d'une émotion, est à l'origine du phénomène de la "chair de poule". Grâce aux réseaux nerveux ramifiés entourant les follicules pileux, les poils participent aux sensations tactiles.
La distribution des poils sur le corps est inégale. Dans la répartition et l'abondance de certains d'entre eux intervient une hormonodépendance ; ainsi, l'apparition de la pilosité ambo-sexuelle (pilosité pubienne et axillaire (aisselle)) fait partie des caractères sexuels secondaires marquant la période de la puberté.
Les follicules pileux se forment une fois pour tout pendant les premiers mois de la vie intra-utérine et bien que les poils auxquels ils donnent naissance puissent être très différents selon le sexe ou la race, leur nombre est toujours le même. Au cours du développement de l'être humain, trois sortes de poils se succèdent :
a - le lanugo, très fin, frisé, non pigmenté, qui couvre le fœtus et tombe au septième mois de la grossesse pour être remplacé par ;
b - le duvet, également incolore, doux au toucher et ne dépassant pas 2 cm de long ;
c - les poils définitifs, pigmentés, qui plus ou moins longs et serrés, couvrent diverses parties du corps, en particulier le crâne (cheveux), les aisselles, les régions sexuelles. Une partie du duvet ne se transforme en poils définitifs qu'au moment de la puberté, la répartition et la densité de la pilosité dans certaines régions (joue, ventre, pubis) variant considérablement selon le sexe.
Pour résumer, la femme possède un nombre de poils identiques à ceux de l'homme. La différence provient de la production hormonale. Les testostérones de l'homme font maturer le poil sur une plus grande surface que chez la femme. La production hormonale de la femme fait que les poils sur le visage, sur la poitrine et sur le dos demeurent du duvet tout au long de sa vie. Ce sont des hormones mâles qu'on appelle les androgènes, sécrétés par la glande surrénale en relation avec la production d'oestrogène des ovaires, qui sont responsables de la transformation du duvet au niveau des aisselles, du pubis, des jambes et des bras en poils définitifs longs, épais et colorés chez la femme.
Une femme, qui développe une pilosité qui ressemble à un homme, hirsutisme, souffre d'une des deux affections extrêmement rares où les hormones mâles (androgènes) sont sécrétées en trop grande quantité : l'hyperplasie congénitale des surrénales, où l'hypersécrétion de l'hormone mâle peut être freinée médicalement ; ou bien une tumeur virilisante de l'ovaire ou de la surrénale. On l'enlève chirurgicalement, et les signes de virilisation disparaissent.
Donc, il n'y a pratiquement pas de femmes qui ont des poils en trop. Il y a seulement des femmes qui ont des poils plus visibles parce qu'elles ont une pigmentation de couleur brune ou noire par rapport à que celles qui en ont une châtaine ou blonde.
L'ensemble de la surface de la peau est en mesure de percevoir plusieurs sensations, mais à des degrés variables. Ainsi, il existe une différence selon l'étendue du système pileux ; celui-ci dispose des terminaisons libres des fibres nerveuses adaptées surtout à la perception de la douleur, et de fibres entourant les racines des poils. Ceux-ci sont particulièrement sensibles au contact, leur rôle récepteur tactile est stimulé par le changement de position du poil qui fonctionne comme un levier élastique.
2°) La physiologie du poil
Le refroidissement du corps
Ce n'est pas pour rien qu'aux endroits du corps les moins exposés à l'air, soit aux aisselles et à l'aine, se retrouve la plus forte densité de poils. Ceux-ci conservent plus longtemps la sueur pour permettre un refroidissement plus efficace. Les poils jouent le même rôle qu'un T-shirt pendant une canicule l'été. En absorbant la sueur, il ralentit l'évaporation et prévient ainsi la déshydratation.
La protection
Les poils protègent les parties génitales contre les coups et les irritations dus aux frottements. Les poils sur les jambes et les bras protègent aussi contre les irritations dues au frottement des vêtements.
La sensibilité
Les poils font partie intégrante du sens du toucher, ils ont des récepteurs tactiles adaptés à la douleur. Ainsi, c'est eux qui détectent la chaleur intense d'un objet en premier et déclenchent le réflexe de recul. Il vous est sûrement arrivé de brûler vos poils avec une allumette sans que votre peau ne le soit.
Comme les poils réagissent au froid avec leur muscle érecteur causant la chair de poule, ils sont sensibles aux variations de température. Ils jouent un rôle de thermomètre avertisseur du système nerveux autonome. Ils détectent plus rapidement et de manière plus précise le changement de température. Ces informations sont essentielles pour permettre au corps de réagir le plus rapidement possible à une variation brusque de la température pour maintenir sa température constante.
S'il fait très chaud le corps baisse son tonus musculaire, augmente le débit de la circulation sanguine aux extrémités et les glandes sudoripares font évaporer de l'eau. S'il fait froid, le corps augmente son tonus musculaire, provoquant le frisson qui produit de la chaleur, la circulation sanguine diminue aux extrémités et les graisses sont utilisées pour produire de la chaleur.
3°) Comment pousse le poil ?
Le poil se forme dans une sorte de poche sous la peau appelée « follicule pileux ». Ce que nous voyons sortir n’est que la tige du poil qui est la partie kératinisée, durcie, de ce tissu pileux qui pousse à partir du follicule.
Les êtres humains ont plus de follicules par centimètres carré que la plupart des autres primates, y compris les chimpanzés et gorilles. Puisque nos poils sont souvent fins et pâles, ils ne sont en général peu ou pas visibles à l’œil nu. Saviez-vous que notre front contient plus de follicules pileux que n’importe quelle autre partie de notre corps ? Les poils plus épais, chargés en pigment que la plupart d’entre nous considérons comme le poil « vrai » et que nous trouvons, en certains endroits gênant, est en fait appelé le poil terminal. Ce poil se trouve sur notre tête (cheveu), nos sourcils, sur nos jambes, sous nos bras et sur le dos.
Chacun de nous possède un rythme de croissance du poil différent qui dépend de l’âge, du poids, du sexe, du métabolisme, des hormones, de notre origine ethnique, des médicaments que nous prenons et d’autres facteurs comme le régime et l’environnement par exemple. Mais tous avons le même cycle pileux divisé en 3 phases :
1) Phase de croissance active (phase anagène), qui dure plusieurs années. A tout moment, jusqu’à 85% de notre pilosité se trouve dans cette phase. C’est là que le poil est le plus chargé en mélanine.
C’est dans cette phase que le poil est le plus sensible au traitement laser. C’est pourquoi plusieurs séances sont nécessaires pour obtenir un résultat durable
2) Phase de régression (phase catagène), qui dure à peu près deux semaines, pendant laquelle le poil s’arrête de pousser mais n’est pas encore détaché. A peu près 3-4% de notre pilosité se trouve dans cette phase à un moment donné.
3) Phase de repos (phase télogène), celle-ci dure 5-6 semaines, après quoi le poil tombe, et, un nouveau poil se forme. Approximativement 1-13% de notre pilosité se trouve dans cette phase à un moment donné.
4°) Les différentes façons de se débarrasser du poil.
Depuis des millénaires, la femme et l’homme, ont souhaités se débarrasser d’une partie ou de la totalité de leurs poils. Pharaon était entièrement épilé afin de montrer sa pureté.
Suivant les époques, les régions, la religion et les mœurs, telle ou telle partie du corps a été rasée ou épilée. Par exemple, au moyen âge, les poils et cheveux du front étaient épilés chez la femme.
Le poil est pour beaucoup plus disgracieux qu’agréable ou esthétique et on a, de tous temps, cherché soit à le discipliner, soit à le faire disparaître. De nombreux moyens sont utilisés dans ce but : coupe, rasage, épilations.
Nous allons essayer de mettre un peu d’ordre dans ces différentes méthodes.
La coupe :
Elle permet de discipliner le système pileux sans pour autant le supprimer. Pour ce faire on peut utiliser le ciseau et plus couramment, et de façon plus pratique, la tondeuse. La mode actuelle, chez l’homme, est le rasage du visage à la tondeuse ; cela permet de présenter chaque jour une « barbe de trois jours » qui fait baroudeur ou élégant-négligé ! On utilise aussi la tondeuse sur le torse et le pubis pour ne pas présenter une apparence qui pourrait faire féminine sans pour cela ressembler à l’homme de Cro-Magnon. Les dames qui utilisent la tondeuse le font souvent au niveau du pubis pour désépaissir le poil parfois surabondant dans cette région.
Le rasage :
Il supprime le poil en le coupant à ras la peau, sans pour cela le détruire durablement. La repousse est immédiate et dès le lendemain le poil réapparaît. De plus, le poil repousse plus dru mais pas plus abondant comme on l’entend dire parfois.
La crème épilatoire :
C’est un rasage chimique, le produit brûle le poil à ras la peau. La repousse est retardée par rapport au rasage mécanique de deux à trois jours mais le résultat est identique à celui du rasage.
L’épilateur électrique :
Il arrache mécaniquement le poil mais présente plusieurs inconvénients. D’une part, il est très désagréable à utiliser sur certaines parties du corps (aisselles, maillot ..), et d’autre part il casse beaucoup de poils ce qui rend la repousse très irrégulière et impose des épilations rapprochées.
La pince à épiler :
Elle permet d’arracher un à un les poils qui nous gênent. Ce sera par exemple la seule méthode à employer au niveau des sourcils. Au passage, si votre esthéticienne vous épile les sourcils à la cire : vous pouvez en changer, elle fait juste ce qu’on dit de ne jamais faire dans les écoles ! Et pour les régions plus étendues, il faut beaucoup de patience…
Les cires à épiler :
Il existe de nombreuses cires différentes. Elles ont toutes le même but : capter le poil dans la cire et l’arracher (bulbe compris) avec la cire. La repousse est retardée et le poil repousse plus lentement. Le choix de la cire à employer dépendra de la région à épiler, du type de peau, du type de poil… C’est la méthode la plus efficace utilisée dans les instituts de beauté. Il faut aussi noter que plus on épile, moins le poil repousse. Je reviendrais en détail dans un autre article sur les différentes cires utilisée actuellement.
L’épilation laser :
C’est une épilation progressive car on sait qu’environ 25% des poils repoussent en deux à trois ans. De plus, elle ne détruit pas les poils en phase de pousse. Cette méthode est donc longue et onéreuse.
L’épilation définitive à l’aiguille :
C’est la seule méthode vraiment définitive puisqu’on glisse une aiguille pour envoyer un courant électrique jusqu’au bulbe du poil qui sera donc ainsi détruit. Le problème est que c’est très long (on travaille poil à poil), douloureux (on brûle le poil) et que tout le monde sait que tout au long de notre vie, les poils poussent, et souvent là où on ne les attend pas. Oncle Jules n’avait pas à 20 ans des poils dans les oreilles et Tante Agathe n’en avait pas, au même âge, pour décorer son menton !
L’épilation à la lumière pulsée :
Dernière arrivée sur le marché. Elle présente les mêmes caractéristiques que l’épilation au laser. De plus on manque encore de recul pour voir si elle est vraiment sans conséquences sur la peau.
PRATIQUE DE L’EPILATION A LA CIRE.
C’est jusqu’à présent celle qui est le plus utilisée en institut traditionnel, c’est sur elle que je vais porter un « autre regard ».
Cette méthode, quelle que soit la cire employée, consiste à étaler de la cire sur la région à épiler puis à l’enlever avec le poil captif.
Alors quel sera le processus à suivre pour obtenir un bon résultat et faire cela correctement ?
Nous l’avons vu, le poil est un phanère.
Il est nourri par un capillaire artériel qui lui apporte les nutriments nécessaires à sa croissance et dispose d’un capillaire veineux qui lui permet d’évacuer les déchets produits par le travail de pousse du poil. Donc, arracher un poil, c’est aussi, ce qui est trop souvent oublié, créer un microtraumatisme, une micro-plaie qui peut tout à fait être la porte d’entrée de microbes ou de bactéries pathogènes ou de germes nocifs.
Et ces bactéries, nous en sommes tous porteurs, même sans en être malades.
La première chose à faire avant l’épilation sera donc de désinfecter la peau le plus efficacement possible. L’alcool à 70° est un excellent produit pour obtenir le résultat escompté.
Ensuite, nous allons procéder à l’arrachage.
La cire est un élément généralement collant et va être posée sur la peau. Si elle est posée directement sur la peau, lors de l’arrachage, en plus du poil et dans le meilleur des cas on enlèvera la couche desquamante superficielle de la peau. Au pire, en tirant la cire on va traumatiser la couche plus profonde de la peau et parfois même provoquer un hématome.
Il faut donc protéger la peau avant de procéder à l’arrachage.
Pour cela, il faut bien tendre la peau avec la main libre pour opposer une résistance à l’étirement, et surtout utiliser du talc ou très peu d’huile. Cela fera un film entre la cire et la peau. Ainsi, lors de l’arrachage la traction ne se fera plus que sur le poil qui est pris dans la cire. Faire toutefois attention : si on met trop d’huile ou trop de talc, il devient impossible d’étaler la cire sur la région à épiler !
Les poils sont arrachés… mais ce n’est pas terminé !
Il ne faut pas se contenter de l’issue victorieuse de notre combat sur le poil !
En effet, en arrachant le poil nous avons arraché le bulbe et on système capillaire. Ceci est souvent très visible sur les zones fortement poilues (aisselles et maillot) puisque nous voyons poindre des gouttelettes de sang.
En coagulant, ces gouttelettes risquent de bloquer la sortie du nouveau poil qui remplacera celui que l’on vient d’arracher. Pour stopper cette microhémorragie et nettoyer correctement la région en la protégeant au mieux d’une infection, il convient d’appliquer un produit utilisé chaque jour en chirurgie et qui remplit ces deux fonctions : l’eau de Dakin. Contrairement à l’alcool qui favorise l’écoulement sanguin, l’eau de Dakin le ralentit. Donc, ne jamais mettre d’alcool après une épilation.
Une autre erreur faite par certaines esthéticiennes est de mettre du talc. Quand on leur demande pourquoi, elles répondent que c’est dans le protocole qu’elles ont appris. Si cela est vrai, ce protocole est incorrect : il revient à mettre du plâtre dans une région suintante, ce qui va cimenter le pore et provoquer la repousse de poils sous peau. Le talc n’est absolument pas un désinfectant, contrairement à ce que répondent souvent les esthéticiennes. Un autre argument est : « je fais ça depuis dix ans et je n’ai jamais eu de problème ». Ce ne sont pas elles qui ont ce problème mais leurs client(e)s dans les jours qui suivent ! Car de même, si ceux qui roulent sans ceinture de sécurité ou envoient des SMS en conduisant n’ont jamais eu de problème, ceux qui en ont eu en faisant les mêmes choses s’en souviennent !
Pour terminer, afin de protéger les micro-plaies qu’on aura faites il conviendra d’adoucir la peau avec une huile post-épilation. Cette huile a aussi l’avantage de pénétrer dans le pore et de faire comme l’huile mise sur certains bocaux : les microbes ne peuvent plus pénétrer le temps que la cicatrisation soit commencée.
Sans oublier d’informer les personnes épilées de ne pas s’exposer à tout risque d’infection pendant la journée qui suit l’épilation, en évitant les piscines, les saunas, la plage….
Et le gommage dans tout ça ?
Certaines esthéticiennes conseillent de faire un gommage avant l’épilation. Médicalement parlant, c’est une erreur fondamentale. Mais ne sommes-nous pas là pour avoir un « autre regard » sur la chose ?
Le gommage va détruire la couche desquamante mais aussi le film hydrolipidique qui recouvre notre corps. Ce film hydrolipidique est l’élément principal de protection de la peau, du maintien de l’hydratation cutanée et de lutte contre les agressions extérieures. Le détruire revient donc à détruire notre armure naturelle pour nous exposer à tous les germes qui viendraient nous agresser. Le gommage étant déjà néfaste en période disons « ordinaire », il devient aberrant de le faire avant une agression programmée des tissus superficiels.
Nous avons un système de défense efficace et naturel, pourquoi le détruire alors que l’on sait qu’on va créer toutes les conditions d’une possibilité d’infection ? Aucun produit, aucune crème ne contient les germes saprophytes du film hydrolipidique : laissons donc la nature assurer cette protection ! Pour moi, enlever le film hydrolipidique avant une épilation c’est comme choisir de conduire une moto sans casque : on arrivera, si on a de la chance, à atteindre notre but ! Mais on n’a pas tous les jours de la chance.
EN CONCLUSION.
J’espère que ce regard différent sur une pratique habituelle de nos instituts de beauté pourra permettre à celles et ceux ayant déjà une pratique raisonnée de l’épilation et qui ont eu la chance d’apprendre un protocole correct de comprendre pourquoi ils font ce qu’ils font. J’espère que celles et ceux qui ont choisi une autre façon de faire réfléchiront et modifieront leurs pratiques, pour réaliser une prestation raisonnée et logique sans nuire à son efficacité.
La réputation de superficialité des esthéticien(ne)s est-elle justifiée ?
Depuis plusieurs années, je suis modérateur sur plusieurs sites d’esthéticien(ne)s.
Je dois avouer qu’au début j’ai été absolument sidéré de lire certaines publications et de voir le niveau lamentable de certaines réponses. Nous n’avons pas la réputation d’être de gros intellos et très souvent, quand je dis que je suis esthéticien, je vois un sourire se dessiner sur le visage de mon interlocuteur. Comme on dit dans le Sud, la traduction de ce sourire est souvent « ben celui-là, il doit être bien brave » !
Un ami dermatologue (dont l’épouse était esthéticienne) me disait souvent : « quand une cliente commence à me dire : mon esthéticienne m’a conseillé …, je crains le pire ». Un autre dermatologue m’avait dit : « je préfère former mes assistantes plutôt que d’embaucher une esthéticienne, je sais au moins qu’elle ne fera pas trop de conneries ».
Très souvent, derrière mon écran d’ordinateur je me suis écrié : « mais c’est pas vrai… » ou parfois « mais quelle conne ! ». Et très souvent j’allais voir le profil de la personne qui, hors contexte, m’aurait semblé avoir un cerveau un peu plus développé que celui d’un concombre oublié au fond du réfrigérateur !
J’ai donc essayé de comprendre pourquoi notre profession a cette triste réputation et ce qui peut le justifier. Et aussi comment faire changer les choses ?
Je lis des dizaines de publications par jour, souvent les mêmes qui reviennent cycliquement. On a plusieurs fois par jour : « vous avez vu ma french comme elle est réussie ? » ou « qu’est ce que vous pensez de mon Baby Boomer ? », plusieurs fois par semaines c’est « j’ai épilé mon copain et il a plein de boutons » et, presque aussi régulièrement « quand je masse je récupère toutes les mauvaises énergies des clientes, comment faites-vous pour ne plus avoir ce problème ? ». Sans parler des problèmes de rehaussement, allongement, teinture des cils ni des rendez-vous non honorés…
Et comme je suis dans un jour de bonté extrême, je ne vais pas vous donner les réponses qui feraient immédiatement étouffer de rire une infirmière, mourir d’une crise cardiaque un médecin et se suicider sur le champ un professeur responsable.
Alors où est le problème ?
La profession d’esthéticien(ne) a très longtemps été réservée à celles et ceux qui étaient en difficulté scolaire. Quand on avait loupé son brevet ou que visiblement on avait atteint le sommet de nos capacités, il nous était conseillé esthétique, coiffure ou aide puéricultrice. Un client qui s’occupe d’orientation en collège me dit que ça n’a pas beaucoup changé. On a donc adapté l’enseignement à ce niveau et il faut reconnaitre que quarante ou cinquante ans après on est toujours au même niveau. La profession est toujours régie par la loi de 1962 ! On voit donc le dynamisme qu’ont mis les enseignants et les syndicats à faire bouger les choses. On se trouve ainsi devant un double problème : le niveau des examens est très médiocre et plus du tout adapté aux techniques et produits actuels, et pour les personnes qui se forment par le biais de l’apprentissage ou de l’alternance elles sont formées par des personnes qui trop souvent ont un niveau trop bas pour les faire avancer. On en est d’ailleurs arrivé à ce que les enseignants expliquent aux élèves que ce qu’on apprend dans les écoles c’est « une technique CAP » mais que ça n’a rien à voir avec ce qu’elles feront dans l’institut !
Et puis, pour les écoles et les centres de formation, c’est se garantir un certain confort. Ils n’ont ainsi pas besoin de chercher à revoir les cours ni à se remettre en question. Une directrice d’école qui avait fait appel à moi pour assurer des formations me proposait de dispenser une formation de podoréflexologie et réflexologie palmaire en 16 heures... Quand je lui ai répondu que pour les kinés qui ont quand même des bases plus solides il fallait au moins 40 heures, elle m’a répondu « mais elles n’y comprennent rien ! Vous leur distribuez les planches avec les points, vous les occupez un peu en pratique et elles seront ravies ! ». Et c’est comme cela qu’ensuite on a des filles et des garçons qui, en toute bonne foi et parce qu’elles ont suivi une formation, se considèrent comme de vraies professionnelles. Combien parmi celles qui font du massage ont entendu parler de chaînes musculaires et aponévrotiques ? Combien savent ce qu’est une lemniscate ? Combien ont la moindre notion de posturologie…. ? C’en est désespérant. On lit régulièrement « depuis que j’ai fait ma formation de posturologie, je ne prends plus les mauvaises ondes de la clientèle ». Mais oui, ce qu’on appelait « les mauvaises ondes » n’était que le résultat de la crispation due à une mauvaise position et un bon positionnement a fait disparaître ces crispations ! On parle du massage comme on en parlait il y a un siècle : magnétisme, ondes, fluides… On occulte les remarquables avancées de Mézières, Still, Struiff Denys, Wodder, Gerda Alexander, Elisabeth Dicke et tant d’autres. Et puis il est plus facile d’enseigner « un protocole » comme c’est souvent présenté (c’est-à-dire un mode d’emploi) que d’expliquer le pourquoi et le comment de chaque manœuvre. Je vois très régulièrement proposer (en 16 heures puisque c’est la norme en formation) l’apprentissage du massage Suédois ! On se moque vraiment de nous et je me dis parfois que celles et ceux qui proposent ça ne se rendent même pas compte, par manque de formation eux-mêmes que c’est complètement débile.
Et les sommets sont souvent atteints lors des discussions sur l’épilation ! Une épilation, c’est à la base des poils qu’on arrache donc un micro traumatisme cutané qu’il faut gérer. Lorsqu’on voit les solutions proposées avec en conclusion « et puis, tout compte fait, à chacun sa méthode », il y a vraiment de quoi se poser des questions. Entre celles qui désinfectent au talc et celles qui considèrent que si les hommes épilés ont plus de boutons c’est parce que tout le monde sait que les hommes sont sales, il y a toute une gamme de déclinaisons possibles et toutes aussi surréalistes les unes que les autres. Nous en sommes au point où il a fallu créer des modules de formation professionnelle en épilation ! Les filles qui en sortent sont émerveillées, apprennent plein de choses, comprennent ce qu’elles font…mais merde !!! Pardonnez-moi cet écart de langage, mais l’épilation n’est-elle pas la base du métier avec les soins de peau ? Oui, à le voir ainsi, on est vraiment tombé très bas.
Mais y a-t-il une solution ?
Cela confirme bien que dans chaque domaine de l’esthétique il y a un vrai problème fondamental de formation. Il faudrait tout reprendre en main : les programmes non adaptés, les formations assurées par des personnes souvent dépassées ou malheureusement peu compétentes, les référentiels qui sont déconnectés de la réalité de terrain et des besoins actuels…. Je pense qu’il serait difficile d’obtenir, sans une réforme des études, que les écoles cherchent à se réformer seule. Et que faire des enseignants incompétents ? On ne peut pas non plus vérifier que chaque esthéticienne qui prend un contrat de qualification ou une apprentie soit au niveau ! Avec l’ancienneté, toute professionnelle de l’esthétique est supposée le devenir et ne doute généralement pas une seconde qu’elle l’est ! Il y a un gros travail qui s’offre aux syndicats et aux revues professionnel(le)s qui devraient oublier les publi-reportages pour laisser davantage de priorité aux informations plus sérieuses … mais moins lucratives.
Hélas, en haut lieu, là où on pourrait peut-être faire évoluer un peu les choses, je crains que tout le monde ne s’en contre-fiche. Nous restons pour eux l’image de la futilité, du superficiel, du bling-bling et de l’inutilité complète. Si ce ne sont pas les professionnel(le)s qui se prennent en main, la bataille n’est pas gagnée et, à lire ce que je lis chaque jour, la prise de conscience ne touche malheureusement qu’une minorité d’entre nous.
J’ai eu l'honneur de suivre, pendant deux ans, les cours d’acupuncture que donnait le Docteur Jean François Borsarello à Lyon. J’y ai obtenu mon diplôme en 1972. J’ai, dans le même temps suivi les formations des docteurs Paul Nogier et Henri Jarricot. Quelle chance j’ai eu de rencontrer et de suivre ces trois grands précurseurs.
Tous insistaient sur la grande différence qu’il existait entre un traitement dit « de terrain » et un traitement dit « de brindille ». L’un soignait, l’autre colmatait. En médecine allopathique, c’est un peu comme si on parlait de traitement de fond et de traitement de symptôme. Une personne a mal à la tête: elle prend de l’aspirine, et ça peut être suffisant pour la soulager, pas pour la soigner.
Depuis cette époque, de l’eau est passée sous les ponts. On vit dans un siècle d’information permanente, de rapidité …on n’approfondit plus : on n’a plus le temps.
Les formations actuelles en esthétique et en bien être sont souvent rapides, trop rapides, parfois même bâclées. Je vois régulièrement des formations en podo-réflexologie en 16 heures, des formations en drainage lymphatique en 20 heures et cela sans aucun diplôme de base requis. En tant que kiné, ma formation en podo-réflexologie s’est déroulée sur 72 heures et ma formation en drainage lymphatique sur 100 heures ! On passe donc du terrain à la brindille.
On n’apprend plus une méthode mais un protocole. On voit régulièrement des personnes demander sur les forums : « je n’ai plus le protocole du massage truc ou machin, est-ce que quelqu’un peut me le passer, je l’ai oublié ». On n’apprend plus le « pourquoi » du soin mais le « comment ».
Et quand on demande à une personne pourquoi elle fait de telle ou telle manière, on a toujours la même réponse : « parce que c’est comme ça que j’ai toujours fait ! ». C’est ainsi qu’on voit perdurer des erreurs de logique dans de nombreux soins, y compris les plus basiques comme l'épilation. En plus, quand les moniteurs de stage ou les formateurs transmettent une erreur, ça peut se perpétrer sur des générations ! Et le fait est que, sur les forums, on voit revenir souvent les mêmes questions avec les mêmes réponses totalement incorrectes de personnes qui se vexent si on a le malheur de leur faire remarquer leur erreur.
J’ai vraiment l’impression qu’on est passé, en tout, du « terrain » à « la brindille » et ce qui me semble le plus inquiétant c’est qu’il risque bientôt de ne plus avoir de personnes formées suffisamment pour enseigner en profondeur et correctement les soins que nous pratiquons ou recevons chaque jour dans le domaine du bien être et de la beauté.
Depuis plusieurs années, je suis modérateur sur plusieurs forums d’esthéticiennes. Je vois donc chaque jour quelles sont leurs souhaits, leurs rêves, leurs ambitions…mais également leurs problèmes. Je vais employer le mot « esthéticienne » systématiquement et par facilité parce que dans la profession, nous, les hommes, ne représentons pas plus de 1% du groupe !
En réalité, le monde de l’esthétique recoupe plusieurs sphères différentes dont les intérêts sont parfois complémentaires mais aussi souvent opposés. On y trouve les professionnelles qui sont soit salariées, soit indépendantes ; les fabricants de matériels esthétiques et de produits ; les écoles, les centres de formation ; les syndicats ; la presse professionnelle ou généraliste ; la clientèle et les satellites qui aident les esthéticiennes ou qui essayent tant bien que mal de se faire de l’argent sur le dos des uns ou des autres.
Commençons par la presse.
La presse généraliste utilise souvent l’esthétique comme bouche-trou. On ne sait pas quoi raconter alors on retrouve ce que les journalistes appellent les « marronniers » : mincir avant l’été, la franc maçonnerie au sein du pouvoir, le lobby gay, les vaccinations… autant de sujet récurrents.
On y présente l’esthétique sous un jour idyllique. L’esthéticienne qui fait un soin du visage à une dame souriante et détendue ou alors une cliente en massage, proche du Nirvana. Il y a làde quoi tenter la jeune fille qui ne peut que rêver devant cette profession ou tout n’est que beauté et senteurs de rêve. En réalité, si elle venait s’immerger une semaine dans un institut, elle verrait très vite qu’on passe une grande partie de notre temps à arracher des poils, à faire le ménage, et pour celles qui ont une clientèle de massage à se casser le dos.
La presse professionnelle est fortement dépendante des publicités : ce n’est donc pas sur elle qu’il faut compter si on veut avoir des informations objectives sur tel ou tel produit, sur un nouvel appareil ou sur une méthode. Souvent, les articles qu’on y trouve sont des publi-reportages qui manquent complètement d’objectivité.
Regardons ce qui se passe du côté des fabricants.
Eux, ils ont un seul but : s’enrichir… et c’est tout à fait normal. On ne va quand même pas leur reprocher d’essayer de bien gagner leur vie ! Donc ils vont sans cesse chercher à créer le produit nouveau ou l’appareil miraculeux.
Quand ils auront cette nouveauté il leur faudra convaincre l’esthéticienne qu’avec ce produit ou cet appareil elle obtiendra des miracles, qu’elle augmentera sa clientèle, avec de nouvelles possibilités de ressources et l’affaire est entendue.
Et si on ne trouve pas de nouveauté, on va ressortir l’appareil ou le produit qui avait été lancé vingt ans plus tôt, en se disant que très peu d’esthéticiennes durent aussi longtemps et qu’on pourra piéger la nouvelle génération. Il est évident qu’il n’y a aucune raison que ce qui ne marchait pas il y a vingt ans marche mieux aujourd’hui, mais en attendant que ça se sache on peut caser son stock.
Etant dans la profession depuis un demi-siècle, j’ai régulièrement vu revenir les mêmes appareils et les mêmes produits sous un nouveau packaging. Il y a aussi ce qui fut un temps l’appareil « miracle » des kinés, qui ne se vend plus chez eux et qu’on propose (avec un look plus féminin) aux esthéticiennes. On se garde bien de leur expliquer pourquoi les kinés y ont renoncé !
Les écoles.
La plupart des écoles et des centres de formation sont privés, donc a but lucratif. Ce n’est donc pas de ce coté qu’il faut non plus chercher une information objective. Je n’ai jamais entendu une directrice d’école expliquer à une maman qui vient inscrire sa fille (et qui payera dans les 6000 euros) : « Vous savez madame, on forme en France entre 18000 et 20000 esthéticiennes par an et le marché n’offre que 3500 nouveaux postes. A un horizon de 10 ans, il y a 80% des diplômées qui ont dû changer de métier. Moi, ce serait ma fille, je lui conseillerais immédiatement une formation de technicienne de surface ».
En plus, la gamine rêve depuis des mois « de maquiller des stars » ! On ne va quand même pas la décevoir ni lui expliquer que, malgré toutes les émissions de téléréalité, des stars, il n’en sort pas des milliers par an !
On voit donc sur nos forums des personnes qui, après des années de travail n’arrivent pas à se dégager le montant d’un SMIC, et que la durée de vie d’un institut n’est souvent que de 3 ou 4ans.
Les syndicats.
Il y a principalement 2 syndicats : un qui regroupe les esthéticiennes et l’autre qui regroupe « le monde le l’esthétique ».
Dans le second on a les écoles, les fabricants, les commerciaux… donc des personnes qui n’ont pas les mêmes préoccupations que l’esthéticienne de base. Ils ne sont pas opposés par exemple à un énorme retour en arrière de la profession : le diplôme de marque. Quand j’étais jeune, on pouvait ouvrir un institut avec une formation (souvent de 10 jours maximum) au sein d’une marque. De nos jours, la CNAIB a fait changer les choses et il faut désormais un CAP d’esthétique pour ouvrir. Mais de grandes marques ont détourné cette loi en inventant de nouveaux métiers improbables en formant des personnes sur un appareil spécifique ou avec des produits particuliers. On peut ainsi être « endermologue » et pratiquer des soins amincissants sans aucun diplôme reconnu. On peut également ouvrir un « bar à ongle », un « bar à sourcils », un « centre du sourire » ou même un centre d’épilation avec appareil sans aucundiplôme reconnu. Les esthéticiennes sont donc confrontées à une concurrence directe sans avoir la possibilité de réagir. Elles ont fait des mois d’étude pour rien, la loi est régulièrement détournée.
Et je ne parle pas des centres de bien-être et de massages qui mériteraient un livre à eux seuls !
Je pense, mais cela n’engage que moi, que la CNAIB s’est aussi parfois trompé de buts et de cibles. Quand je reçois les formations proposées, j’ai l’impression d’assister à une fuite en avant alors qu’il faudrait parfois revenir aux fondamentaux.
Les esthéticiennes s’installent trop souvent sans aucune base sérieuse en comptabilité. Elles ne savent pas tenir un carnet recette-dépense et confondent le chiffre d’affaire avec le bénéfice. Elles s’inscrivent en auto-entrepreneur alors que c’est très souvent la pire des solutions. Quant au niveau pratique, on leur propose par exemple une cinquantaine de massages différents alors que la grande majorité d’entre elles (et malheureusement des formateurs aussi) ignore les bases de l’anatomie, ce qu’est un réflexe, un arc réflexe, une chaîne ostéopathique, une chaîne musculo-aponévrotique… On dissimule alors ces lacunes derrière des mots ouatés qui font rêver : le fluide, l’énergie, le magnétisme … on revient au XVIIIe siècle pour ne pas dire au Moyen Âge !
On voit également de nombreuses professionnelles qui font des erreurs grossières même dans la simple pratique de l’épilation : il s’agit pourtant là d’une base fondamentale du métier et pourtant, des formations seraient très souvent plus que nécessaires en ce domaine.
Les esthéticiennes.
Elles sont l’élément central de la profession, à la fois actrices et victimes.
Oui, victimes du contexte médiatique, des commerciaux, de la mode…autant de pressions qui les poussent parfois à se laisser embarquer dans une aventure que très rapidement elles ne maitrisent plus et les mène au désastre.
Elles achètent ainsi très cher des appareils qui ne donnent pas les résultats escomptés. Elles se retrouvent avec des stocks de produits, parce que la marque exige l’achat d’une certaine quantité pour une « ouverture de compte », sans parvenir ensuite à les écouler. Elles suivent également des formations bidon qui ne leur apportent rien au niveau clientèle.
Lorsqu’on s’installe, on est pris dans un tourbillon, entre ce qu’on voit dans la presse, au Congrès, à la télé… ce qui nous est demandé par la clientèle qui passe son temps sur internet, ce qui nous est proposé par les commerciaux. Il est difficile de rester les pieds sur terre et, quand on décolle, il faut tenir et rester vigilant sous peine de très vite retomber et s’écraser ! C’est malheureusement ce qui arrive très régulièrement dans la profession, avec une conséquence inattendue qui est aujourd’hui la difficulté pour une esthéticienne d’obtenir par exemple un prêt bancaire.
Les satellites.
Et oui, la profession compte aussi ses satellites ! Certains sont positifs, d’autres le sont moins.
Comme il existe des satellites qui nous aident à mieux vivre, nous avons dans la profession des sociétés qui nous apportent une aide. C’est par exemple la société UDEF dont le but est de regrouper un maximum d’esthéticiennes pour obtenir des remises chez les commerçants, les fabricants et même les centres de loisir. Il s’agit d’une centrale d’achat pour professionnelles de la beauté. Les personnes qui en font partie réalisent vite ce qu’elles peuvent en tirer comme bénéfices et il y a fort à parier que les boites seront de plus en plus nombreuses à chercher à devenir partenaires.
Nous connaissons tous également les satellites-espions, dont la vocation est moins sympathique à nos yeux. Nous en avons pourtant dans la profession !
Parmi les plus connus d’entre eux, je citerai le groupe « Groupons ». Celui-ci permet à l’esthéticienne de se faire connaitre grâce à une publicité importante, mais en bradant son savoir-faire par une prestation à bas prix. En effet, elle travaille ainsi souvent presque à perte car la clientèle « Groupons» ne se fidélise que très peu. Elle recherche avant tout la bonne affaire avec un prix attractif, et partira très vite sur la nouvelle offre qui lui semblera attirante. Par exemple, un massage à 70 euros proposé sur « Groupons » à 35 euros ne rapportera que moins de 30 euros à l’esthéticienne. A ce prix, il n’est pas évident qu’elle couvre ses frais et elle risque ensuite de se retrouver face à une demande de personnes qui la considéreront comme une voleuse le jour où elle demandera le juste prix.
Il y a encore tous ces annuaires totalement inutiles qui tentent de séduire les esthéticiennes en leur proposant, contre monnaie sonnante et trébuchante, de figurer en bonne place dans un annuaire parfaitement inconnu et que personne ne consulte jamais !
Bilan.
Le résultat de tout cela est qu’il est très difficile de s’y retrouver et d’y voir clair ! Il faut bien convenir que ce n’est pas toujours, hélas, du gagnant-gagnant. Le syndicat des professionnels a tout intérêt à maintenir un flou plus ou moins artistique sur les réglementations et de nombreuses professionnelles s’y laissent prendre. Les écoles n’ont pas davantage intérêt à jouer le jeu de la franchise non plus. La presse, quant à elle, est plus ou moins muselée. Les syndicats bénéficient d’aides de la presse et des fabricants donc ils n’ont pas les coudées franches. C’est un gros panier de crabe dans lequel l’esthéticienne sert d’appât ! Et elle n’a trop souvent ni la formation ni les connaissances suffisantes pour se défendre.
Alors que faire ?
Je pense qu’il faudrait déjà imposer aux esthéticiennes qui vont s’installer une formation d’un niveau plus élevé. On peut être un excellent professionnel sans être capable de gestion et, dans ce cas, on court directement au casse-pipe !
On peut avoir une main de fée et se laisser berner sur les possibilités de résultats de tel ou tel appareil. On peut avoir un toucher en or sans pour autant ignorer les bases scientifiques et techniques des soins que l’on prodigue. On lit très régulièrement sur les forums « mais les dermatos, qu’est-ce qu’ils ont de plus que nous ? » et j’ai souvent envie de répondre (mais je me ferais insulter) « Juste 8 ou 10 ans d’études ! ». Sans en arriver là, il serait bon que la formation professionnelle évolue et n’en reste pas au niveau où elle en est actuellement.
Il faudrait une législation plus rigoureuse et, avant d’essayer d’obtenir telle ou telle compétence nouvelle, sécuriser celles qui nous sont retirées régulièrement.
Je suis persuadé qu’on devrait laisser plus librement s’exprimer dans la presse professionnelle des personnes qui ne caressent pas les financeurs dans le sens du poil ! Il n’y a que dans la presse et les revues papier glacé que l’on est dans le monde de Bisounours : la réalité nous remet vite les pieds sur terre.
Je me souviens, après la sortie d’un nouvel appareil, avoir proposé un article qui expliquait pourquoi il ne pouvait pas fonctionner. Cet article avait été refusé pour ne pas faire peur aux autres qui faisaient de la pub sur la revue. Je suis passé dans l’émission télévisée E=M6 où j’ai donc expliqué l’escroquerie. J’ai reçu nombre de menaces à la fois de la part de vendeurs et d’esthéticiennes qui avaient déjà acheté ce matériel et, même pas 6 mois après, il était retiré du commerce ! Un regard un peu plus critique de la part des professionnelles de l’esthétique aurait pu leur éviter ce piège et ses conséquences financières.
Il faudrait informer les esthéticiennes des embuscades dans lesquelles elles risquent de tomber. Il y a les arnaques que l’on connait tous et, sur les forums, quand une esthéticienne vient demander de l’aide, les autres la mettent vite au courant mais cela n’empêche pas très régulièrement d’autres de tomber dans le panneau. Et puis il y a les arnaques plus subtiles. Je me souviens d’une maison, aujourd’hui disparue, dont standardistes jouaient les commerciales forcenées. Lorsqu’on les appelait pour prendre des renseignements sur un appareil, elles ne cessaient ensuite de téléphoner à l’institut en se faisant passer pour des clientes souhaitant un soin nécessitant d’avoir le dit appareil. Quand l’esthéticienne avait refusé plusieurs soins parce qu’elle n’avait pas cet appareil, elle craquait et l’achetait et, du jour au lendemain, il n’y avait plus aucun appel ni aucune demande de rendez-vous. J’avais alors dit à mes élèves et stagiaires : « Dites que vous an avez un d’occasion qui va arriver la semaine suivante » et cela fonctionnait : plus d’appels !